Comment SP3H s’apprête à entrer sur le marché

Créée en 2005, l’entreprise aixoise a développé un scanner miniaturisé capable d’analyser la qualité d’un carburant en temps réel. Ses premiers produits devraient être commercialisés cette année auprès d’industriels de la pétrochimie, de l’aéronautique mais aussi de l’agro-alimentaire.
(Crédits : DR)

Si SP3H a été créée il y a quatorze ans, son idée était en germe depuis bien longtemps. Alain Lunati, son fondateur, a d'abord travaillé une dizaine d'années dans le domaine du pétrole dont  il analysait la qualité en temps en réel à l'aide d'analyseurs infrarouges "gros comme des armoires" et pour le moins onéreux puisqu'il fallait compter environ 150 000 euros l'analyseur.

L'idée était alors de miniaturiser cette technologie pour l'intégrer à des voitures, "avec un prix inférieur à 100 euros". Un moyen de réduire la consommation et les émissions de CO2 puisque la voiture va adapter son comportement en fonction de la qualité du carburant, afin de rester dans les clous des normes environnementales.

Vite se frotter au marché

Alain Lunati planche sur le sujet pendant une quinzaine d'années avant de créer officiellement la société en 2005, alors que le groupe PSA s'intéresse à la technologie. Un contrat est conclu avec le constructeur automobile, à hauteur de 1,5 million d'euros sur trois ans. "A ce moment-là, on ne leur a vendu que des slides, nos idées". Car depuis le début, la stratégie de l'entreprise est "de vite se frotter au marché pour ne pas perdre de temps".

Les prototypes s'ensuivent, de plus en plus petits et performants, "orientés pour le marché" avec un prix de seulement 30 à 40 euros en gros volume, pour une taille de 5 à 6 cm. Et ils convainquent les investisseurs et business angels, tant et si bien que SP3H sera parvenue à lever un total de 20 millions d'euros en 13 ans. D'autant qu'en 2014-2015, des prototypes ont été testés en conditions réelles. "Nous avons embarqué notre FuelBox dans une voiture et elle était capable d'analyser la qualité du carburant toutes les 30 secondes de manière totalement autonome. Nous l'avons fait rouler dans une vingtaine de pays en Europe, sur 150 000 km". L'occasion de démontrer la robustesse du produit et sa résistance face aux chocs, vibrations et températures. Ce qui vaut à SP3H l'obtention d'un label et d'un financement H2020 à hauteur de 1,2 millions d'euros.

"Profileur" de produits industriels

"Nous sommes passé d'une phase de recherche et développement à une phase plus proche du marché, ce qui nous a offert une plus grande visibilité". Visibilité qui attire l'œil des industriels : "ils sont intéressés car notre système est petit et environ dix fois moins coûteux que les analyseurs qu'ils utilisent". Ainsi, la FuelBox est testée en raffinerie. Mais l'agroalimentaire s'y intéresse également pour analyser la composition moléculaire de produits tels que le lait, le sucre ou l'alcool. De même que le secteur de la chimie pour les lessives par exemple, ou encore l'aéronautique.

Car tout au long de ces années, SP3H est devenu un expert du "profilage" des produits. "Vous me donnez un produit et je vous dis où il a été fabriqué et quelle en est la qualité", résume Alain Lunati. "Nous fournissons un boitier qui transforme une information analogique en information digitale". Une expertise qui s'adresse en premier lieu à de grands comptes de l'industrie affichant plusieurs milliards de chiffre d'affaire. "L'objectif est de traquer des leaders, des acteurs assez gros pour faire cas d'école. S'ils nous choisissent, nous aurons accès à tous les suiveurs, qui prennent moins de risques".

Une commercialisation par étapes

A l'heure des dernières vérifications, l'entrée sur le marché est imminente pour la petite entreprise aixoise." L'objectif est de produire une centaine de capteurs pour les industriels cette année, sur un marché où les prix proposés par les concurrents sont de l'ordre de 30 000 à 150 000 euros pour des analyseurs classiques. Nous leur proposons des prix allant de quelques milliers à quelques dizaines de milliers d'euros". La société espère ainsi réaliser un chiffre d'affaire d'un demi à un million d'euros en 2019.

Puis en 2020, ce sera le marché de l'automobile qui sera dans le viseur, en premier lieu desquels les véhicules professionnels. "Il existe une taxe sur les véhicule de société avec des taux qui varient selon les émissions de CO2. Notre solution leur permettra donc d'avoir une fiscalité plus avantageuse". Les véhicules particuliers viendront dans un second temps, et Alain Lunati mise sur un intérêt croissant des constructeurs en raison des normes environnementales de plus en plus strictes. "A partir de 2020, un seuil d'émission de 95g de CO2 par kilomètre sera fixé. Et pour chaque gramme au-dessus de ce seuil, le constructeur devra payer 95 euros de malus. Avec notre technologie, on peut gagner jusqu'à 10% de consommation et de CO2. Cela peut suffire à passer de l'autre côté du seuil".

Mais SP3H n'assurera pas la production, son modèle étant basé sur des royalties et des droits de licence. "Il nous faudra donc trouver des partenaires automobiles pour mettre en place une chaine de production". L'ambition étant de produire une dizaine de milliers de capteurs en 2020, puis plusieurs dizaines de millions à terme, sur le marché européen en priorité, international ensuite.

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