« Il faut laisser les investisseurs prendre des risques » (Jonathan Laroussinie, Rise Partners)

Être en avance, disrupter, créer ou répondre à de nouveaux usages… la question de l’innovation n’est plus depuis longtemps – n’a-t-elle d’ailleurs jamais été – qu’un sujet de startup. Mais lorsqu’elle vient bousculer des usages, des modes de consommation, qu’elle ajoute des briques technologiques, l’innovation est synonyme de croissance potentiellement accélérée. Si les grandes entreprises ont parfois été dépourvues face à ce qui disrupte leur secteur, elles ont depuis parfaitement compris comment se lier aux startups. Et celles qui connaissent un rythme d’hypercroissance sont encore davantage regardées avec intérêt. Comment le dialogue entre pépites et grandes structures doit-il s’organiser pour être équilibré ? Et côté financement, les critères ESG viennent-ils vraiment bousculer la donne ?
(Crédits : DR)

« L'innovation, c'est ce qui est en décalage avec ce qui est connu, c'est ce qui va créer une disruption, créer de nouvelles habitudes ». La définition est de Jonathan Laroussinie. Le co-fondateur et dirigeant de Rise Parters, cabinet spécialisé dans l'accompagnement et le financement des entreprises innovantes, basé à Sophia-Antipolis, s'intéresse particulièrement à ces pépites capables de venir bousculer en profondeur des secteurs, des métiers, des usages. Des pépites capables également de croître particulièrement rapidement. C'est ce que l'on appelle l'hypercroissance et évidemment, elles créent beaucoup d'intérêt...

Car ces pépites - qui pour le coup, portent bien leur nom - allient innovation et croissance. Le nouveau et la capacité à grandir. Or, souvent, l'innovation peut exiger du temps pour rendre sa solution, son produit, son logiciel... matures, trouver un marché, convaincre les clients. La capacité à croître est d'autant plus un sujet qui porte intérêt dans un contexte économique contrarié. Et cela concerne toute typologie d'entreprise, de la plus moyenne à la plus grande.

Gagner du temps... et de l'argent

« Ce que cherchent les entreprises c'est l'innovation, pas la croissance pour la croissance », assure Jonathan Laroussinie. Allant jusqu'à créer des usages tous neufs. « Comme Sony l'a fait avec le Walkman ». C'est ce qui s'appelle faire naître un nouveau marché. C'est aussi ce qui fait la différence entre croissance traditionnelle et croissance innovante. « Depuis quelques années, cette innovation disruptive est outsourcée ». Aller chercher à l'extérieur cette innovation génératrice de richesse est la façon souvent la plus rapide de l'intégrer dans son modèle économique. Parce qu'investir en R&D coûte cher, exige des compétences idoines, du temps... Et qu'il est donc plus rapide et plus stratégique de s'allier les solutions de ces startups, quand elles, sont à la recherche de la force de frappe que peut apporter une grande entreprise, PME ou ETI. « L'émergence de solutions innovantes en matière d'usage de services a prouvé que ce type d'innovation est rentable », indique Jonathan Laroussinie. « Les grands groupes ont donc intérêt à s'appuyer sur des solutions qui existent déjà. Cela permet d'évangéliser, de gagner du temps en R&D et en coûts. La forme peut être diverse, cela peut être de l'intégration (un rachat NDLR) ou un partenariat. L'économie de l'innovation sert à de grandes organisations pour se remettre en question et aller chercher des relais de croissance ».

Investissement multiplié par 7

Ce rapport grands groupes - startups s'est-il (re)équilibré ? Car, clairement, il a été un temps, inégal, les grands groupes allant vers les jeunes pousses désireux d'intégrer leur innovation sans pour autant les considérer véritablement, comme des entreprises à part entière. Sauf que les startups depuis, ont fait leur place, regardées avec intérêt grandissant par les investisseurs, bien plus facilement qu'il y a dix ans, ce qui leur permet aussi de disposer de plus de temps pour négocier avec les grands groupes. « En dix ans, l'investissement fléché vers l'innovation a été multiplié par 7. Ce sont des placements de plus en plus rentables. Et ce n'est pas parce qu'une jeune pousse a un petit chiffre d'affaires qu'elle n'est pas capable de parler business et de négocier avec une entreprise du CAC 40 ». Aller chercher ailleurs la solution innovante qui leur va bien, c'est une démarche que de nombreuses ETI ou grands groupes ont totalement intégré désormais. « Ils sont entrés dans cette logique d'innovation qui peut être encore plus pertinente en mettant, d'un côté, des moyens à disposition et en bénéficiant, en retour de l'agilité des startups ». Si le rapport grands groupes - startups s'est rééquilibré, l'intégration des secondes au sein des premiers ne s'est pas arrêtée pour autant. Là encore il se fait différemment. « Lorsqu'une startup se fait absorber par une grande entreprise ce n'est synonyme de stop and go mais de go ».

Mouvement darwinien

Si les startups trouvent financement à leur projet, l'émergence des critères ESG est-elle capable de changer profondément le regard des investisseurs sur les pépites ? Quid du critère principal ? Est-ce (encore) le potentiel et la rentabilité ou est-ce la notion d'impact ? « Le mouvement d'innovation est darwinien. C'est le propre de l'homme d'évoluer. Cette innovation doit permettre de répondre à des problématiques globales, sociétales, environnementales ». Certes, le ROI demeure un critère pour l'investisseur, mais pas au-delà de la notion d'impact. Autrement dit, entre une entreprise rentable mais pas durablement correcte et une entreprise à la rentabilité moindre mais soucieuse de son impact, le choix sera désormais vite fait, assure Jonathan Laroussinie. Mais, ce qui pourrait vraiment aider le monde de l'innovation, c'est de ne pas tout normer, encadrer, réglementer. « Il faut laisser les investisseurs prendre des risques ». Le capital-risque, le vrai, encore un tout autre sujet...

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