Avec ses frites fraîches, So Potato se pose en alternative au surgelé dans la restauration

Installée à Marseille, cette jeune entreprise transforme des pommes de terre du nord de la France en frites fraîches, à destination de la restauration. Une façon de proposer une alternative sur un marché dominé par le surgelé, coûteux et de qualité assez faible. Après une première année qui lui a permis de sonder son marché, So Potato s’apprête à accroître considérablement ses capacités de production. Après quoi elle devrait conquérir l’ouest des Bouches-du-Rhône.
(Crédits : DR)

On en consomme 11 millions de tonnes par an à l'échelle planétaire. Croquante et salée, fondante en son centre, la frite s'est imposée dans nos modes de vie et plus encore sur les tables des restaurants. Selon une étude du cabiner Gira Conseil de 2017, ces derniers en serviraient ainsi dans deux assiettes sur trois en France.

Ludique, elle peut se déguster sans couvert, ce qu'apprécient particulièrement les enfants. « Je pense aussi que c'est un accompagnement qui rassure car tout le monde sait ce que c'est », pense Lucas Meyer, cofondateur de So Potato. Côté restaurateurs, la frite n'exige pas de compétences pointues et coûte peu cher, ce qui permet de dégager d'intéressantes marges. Seul bémol : sa préparation exige des gestes répétitifs et chronophages. Alors on lui préfère une version surgelée, gustativement moins intéressante. « Les chefs n'ont généralement pas envie de s'en occuper et délèguent cela à des commis ». Commis qui n'ont par ailleurs pas que cette tâche à accomplir, et qui se sont raréfiés depuis l'épidémie de covid-19.

Le covid-19, c'est dans le même temps ce qui permet à Lucas Meyer et Florian Martinet de réfléchir plus sérieusement à leur envie d'entreprendre. Le premier travaille comme animateur commercial dans une branche privée de La Poste. Quant au second, il est issu du monde de l'événementiel, passé notamment par l'Olympique de Marseille. « On s'intéressait plutôt à la restauration. C'est un domaine qui nous attirait tout les deux car pendant longtemps, ce secteur a peu évolué. Il a plutôt stagné dans ses codes ». Ils ont envie de le bousculer. « On aurait pu innover sur du digital mais nous avons finalement choisi de travailler sur un produit ». La frite, évidemment.

Approvisionnement en direct

« Souvent, les frites surgelés sont d'une qualité assez médiocre qui n'est pas en adéquation avec ce qu'elle accompagne, un très bon burger, une très bonne pièce de viande... », observe Lucas Meyer. « Nous avons sondé des restaurateurs sur ce sujet et nous avons identifié un besoin. Ils aimeraient proposer des frites maison mais n'ont pas le temps de les préparer ». So Potato est créée en septembre 2021 pour leur proposer des frites fraîches prêtes à cuire.

Au départ, les deux entrepreneurs s'approvisionnent auprès de grossistes. « Mais le prix était très élevé. De fil en aiguille, nous avons compris qu'il fallait que l'on fasse des économies pour pérenniser notre activité. Nous nous sommes vite penchés sur l'approvisionnement directement auprès d'un agriculteur ». Bon an mal an.

Car les imposantes exploitations qui produisent des pommes de terre dans le Nord de la France sont souvent liées pour de longues années - et de façon souvent exclusive - à des mastodontes de l'agroalimentaire. Mc Cain, Mac Donalds .. « Nous, toute petite entreprise, qui arrivions dans un marché aussi concurrentiel, nous avons dû contacter des dizaines et des dizaines de producteurs avant d'en trouver un qui accepte de nous consacrer une toute petite partie de sa production ». So Potato lui propose un prix supérieur au marché en échange d'une qualité elle aussi supérieure. « C'est important pour ne pas avoir de problèmes au niveau de la transformation et de la cuisson ».

Une première année de test réussie

Ensuite, les pommes de terre rejoignent les petits locaux de l'entreprise situés au nord de Marseille, au sein de la pépinière d'entreprises Le Carburateur. Là, elle sont épluchées et découpées par des machines avant d'être mises sous vide. Essentiel pour qu'elles ne s'oxydent pas. « Cela permet de les conserver sept jours au réfrigérateur ». Et ce, sans conservateurs.

Plus fraîches, les frites de So Potato ont aussi la vertu d'être moins chères que leurs concurrentes surgelées. « La différence varie du simple au double selon les marques ». D'autant que les importants outils de production des géants du secteur ont été sources d'importantes dépenses du fait de l'inflation. S'ajoute à cela une hausse des prix due à la combinaison d'une forte demande et d'une production de pommes de terre en baisse du fait de la sécheresse de 2022.

Des atouts qui ont permis à l'entreprise de dépasser ses objectifs en 2022, année de test pour elle. Réalisant un chiffre d'affaire de 220.000 euros, dont la moitié sur les trois derniers mois de l'année. Parmi ses clients, des acteurs assez variés. « Nous avons des brasseries, de plus grands restaurants, des dark kitchen [ces cuisines destinées uniquement à la livraison, ndlr], des pizzerias ou encore des snacks type kebabs ». Pour certains, il s'agit d'une montée en gamme en passant du surgelé au frais. Pour d'autres, l'enjeu est plutôt de se dégager du temps en externalisant la préparation des frites à un acteur local.

Un déménagement et des capacités de production fortement accrues

Car c'est ainsi que se positionne l'entreprise qui fait pour le moment le choix d'assurer elle-même ses livraisons dans un triangle allant de Martigues à La Ciotat en passant par Aix-en Provence. « Notre développement commercial a été freiné par nos capacités de production ». Dans ses deux locaux du Carburateur, elle parvienne à produire 30 tonnes de frites chaque mois. « Il nous aurait fallu un troisième local mais cela devenait trop cher. Alors nous avons décidé de partir pour quelque chose de bien plus grand qui nous permettre d'améliorer encore la qualité de nos produits ». Un déménagement aura lieu dans les prochaines semaines, vers un local de 400 mètres carrés à l'extérieur de Marseille. « Nous aurons une grande chambre froide pour stocker nos produits finis et la matière première ». Repoussant très haut le plafond de production. « Nous serons presque sans limite ».

Dès lors, l'entreprise pourra relancer ses efforts commerciaux, s'étalant d'abord au nord des Bouches-du-Rhône et au sud du Vaucluse. Elle espère ainsi doubler son chiffre d'affaire en 2023, ce qui devrait permettre au deux fondateurs de se rémunérer et aussi, pourquoi pas, de recruter.

Dans un second temps, « on pourrait mettre au point de nouveaux produits ou bien aller vers d'autres modes de distribution en s'adressant à des revendeurs comme Metro ou Pomona ». Le marché des particuliers est aussi un horizon envisagé à plus long terme. « Mais il faut d'abord se concentrer sur les professionnels et faire du volume pour nous développer ». Procéder étape par étape. Pour ne pas frôler l'incident et conserver son allant.

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