Comment O-kidia veut faire entrer le numérique dans la prise en charge des troubles du neuro-développement de l'enfant

Installée à Nice, cette startup veut utiliser les outils numériques pour faciliter le diagnostic et suivre les troubles du neuro-développement chez l'enfant et l'adolescent. Elle entend profiter du CES Las Vegas pour nouer des partenariats, lever des fonds et se déployer en Amérique du Nord aussi bien qu'en Europe.
(Crédits : DR)

Il fut un temps - pas si lointain - où le nourrisson n'était considéré que comme un tube digestif. L'enfant comme un adulte miniature, insensible à la douleur et traversé par des émotions très primaires. Et où le concept d'adolescence n'existait même pas.

Cette époque est révolue. Dyslexie. Dyspraxie. Dysphasie. Hyperactivité. Troubles de l'attention. Troubles du spectre autistique. Haut potentiel intellectuel ou émotionnel. Hypersensibilité. Manque d'estime de soi... La santé mentale et le développement neuronal des enfants sont de plus en plus scrutés par parents et professionnels car on sait combien ceux-ci peuvent un avoir un impact sur tous les aspects de la vie de l'enfant, au quotidien et dans sa vie future.

Sauf que la science en la matière est encore jeune. Le diagnostic de ses troubles est long et fastidieux. « Les outils sont le plus souvent un papier, un crayon, avec des questionnaires qui ne sont pas uniformisés dans le monde », observe Vanessa Douet-Vannucci, fondatrice d'O-kidia. « Les tests durent 60 heures, s'étalent sur deux jours et requièrent trois à six personnes ».

Une clinique digitale des troubles du neuro-développement de l'enfant

Or, face à cela, Vanessa Douet-Vannucci est « choquée du peu d'intégration des technologies numériques pour apaiser les familles, pour diagnostiquer, suivre et traiter les patients ». Tandis que « côté praticiens de la santé, les listes d'attente sont très longues. Et beaucoup de choses découvertes en laboratoire ne sont pas mises en œuvre ».

O-kidia est créée en février 2022 pour y remédier. Avec l'ambition de devenir « une clinique digitale des troubles du neuro-développement de l'enfant ». C'est-à-dire une plateforme en mesure d'assurer une première prise en charge grâce à de l'aide au diagnostic, au suivi des malades et à leur orientation vers les thérapies les plus appropriées.

Pour ce qui est du diagnostic, la startup veut créer « l'équivalent de tests sanguins », appliqués à la santé mentale et au neuro-développement d'enfants et pré-adolescents. Pour cela, elle s'appuie sur une batterie de jeux réalisés sur tablette en 20 à 30 minutes au total et en extrait, grâce au machine learning, diverses métriques telles que le son de la voix de l'enfant, le mouvement des doigts. Des flux divers analysés en temps réel afin de détecter certains troubles cognitifs de manière uniformisée. Une manière de se passer des longs tests habituellement utilisés. Mais pas de l'expertise du médecin et de son analyse de la relation que le patient entretient avec lui, et de la situation globale de celui-ci.

Feu vert pour collecter les données de 786 enfants

Pour réaliser ce diagnostic, l'équipe d'O-kidia s'appuie sur des moteurs de machine learning construits en interne à partir de bases de données concernant des adultes et libres d'accès. Mais elle a pu obtenir une autorisation de la CNIL et de la CPP pour collecter des données similaires auprès de 786 enfants de 7 à 12 ans pour une analyse plus adaptée à ce public.

D'autant qu'à moyen terme, la startup aimerait être en mesure de déterminer, à partir de données analysées a posteriori grâce à de l'intelligence artificielle, quelle thérapie semble plus adaptée à tel type de personne à un instant précis.

Cependant, la première fonctionnalité qu'elle prévoit de commercialiser, c'est sa solution de suivi des jeunes patients permettant d'évaluer l'évolution de leurs troubles. Un outil qui devrait bénéficier d'un marquage CE début 2023 permettant sa mise sur le marché.

Pour l'aide au diagnostic, une étude clinique - l'une des premières en France dans le domaine de l'épidémiologie digitale -doit être lancée en juin 2023 pour donner lieu à une commercialisation fin 2024.

Un CES riche en objectifs, avec une levée d'un million d'euros

Encore à un stage très précoce de son développement, l'entreprise espère accélérer grâce à sa présence au prochain CES Las Vegas. Au programme du voyage, plusieurs objectifs. D'abord, trouver des partenaires locaux, comme des mutuelles, pour permettre la commercialisation de la plateforme sur le territoire nord-américain, un peu plus en avance dans la prise en charge de ces troubles grâce au numérique. Mais aussi pour co-construire une interface qui doit être adaptée aux praticiens de santé et aux familles qui l'utilisent, ainsi qu'à leur contexte socio-culturel.

Le CES doit aussi aider l'entreprise à mener à bien sa levée de fonds d'un million d'euros. « Cela peut paraître ambitieux étant donné notre avancement, mais nous tenons beaucoup à la réglementation et à l'éthique pour avoir un réel impact. Nous avons passé beaucoup de temps à faire attention à ce que tout soit réglementé ». Essentiel pour convaincre des parents méfiants vis-à-vis des outils numériques et de l'usage qu'est fait des données de leurs enfants.

Une crédibilité qui passe aussi par des liens étroits avec les mondes de la recherche et de la santé. Ainsi, l'entreprise niçoise travaille avec le laboratoire Retines (Risques, épidémiologie, territoires, informations, éducation et santé) de l'Université Côte d'Azur, avec les CHU de Nice et Montpellier ou encore avec l'École des Mines à Gardanne au travers d'une thèse Cifre. Pour que numérique et sciences se conjuguent au service des enfants atteints de ces troubles et de leurs familles.

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