Comment Maison la Cornue valorise le lait de bufflonne français

Emblématique de la gastronomie italienne, le lait de bufflonne – dont on tire la fameuse mozzarella di bufala – est également produit en France depuis la fin des années 1990. Un lait français que l’on transforme en fromage et, depuis peu, en glace. A la manœuvre : une entreprise installée à Signes, dans le Var, fondée par le président du fournisseur d’épiceries fines Savor Créations.
(Crédits : DR)

Elle a longtemps été un animal de trait. Une puissante laboureuse.

Importée d'Inde vers la Sicile avant de rejoindre la péninsule italienne aux alentours de Xème siècle, la bufflonne se fait ensuite remarquer pour la qualité et la finesse de son lait dont on tire des fromages à la fois doux et goûteux. Mozzarella. Caciocavallo. Provolone. Ricotta... Et même du beurre. A tel point que le lait de bufflonne devient un emblème de la gastronomie italienne.

Un emblème qui s'exporte. D'autant que l'on découvre au fil du temps les qualités nutritives de ce lait, parmi lesquelles une quantité deux fois supérieures en magnésium et en calcium par rapport au lait de vache. Tandis que la quantité de cholestérol y est 50 % inférieure, bien que ce lait soit plus gras. Parfait pour un public soucieux de mieux manger tout en découvrant des saveurs venues d'ailleurs, quitte à y mettre le prix. L'élevage de bufflonnes étant plus difficile et moins productif.

De l'Italie à la France

Un lait à forte valeur ajoutée, voilà qui finit par intéresser quelques producteurs français du Cantal et de l'Aveyron. Si bien que de premières bufflonnes y sont introduites en 1998 sous la houlette d'un ami d'Alain Leon, président de l'entreprise Savor & Créations. Entreprise qui, depuis son usine de Signes, fournit de nombreuses épiceries fines et s'est faite remarquer par plusieurs innovations telles que des moutardes pailletées d'or, ou encore des sirops Barbapapa, grand succès commercial.

« Mon ami m'a dit que l'on pouvait faire de belles choses avec ce lait. Et qu'il fallait trouver une manière de contrer la saisonnalité de ce produit car que la mozzarella est surtout consommée l'été », explique Alain Léon. « Le lait d'hiver est vendu en lait blanc, à moins d'un euro le litre ».

L'idée fait son chemin dans l'esprit de l'entrepreneur varois. Mais il manque de temps pour s'y pencher. Jusqu'au jour où il décide de céder des parts de sa société.

Une glace sans ajout de matière grasse

L'occasion de concrétiser son idée : celle de proposer non pas un énième fromage au lait de bufflonne mais de la glace, que l'on peut produire tout au long de l'année bien que sa consommation soit saisonnière.

Une glace sans matière grasse ajoutée - celles du lait se suffisent à elle-même - et agrémentée d'ingrédients de qualité : noisettes du Piémont, raisin imbibé de rhum produit dans le Gers, et autres citrons de Sicile... Le tout transformé dans un nouvel outil de production, à Signes, où l'entrepreneur s'est entouré d'un associé parisien, tout en bénéficiant du concours du maître artisan glacier Philippe Faur dans l'élaboration des recettes.

Côté approvisionnement laitier, l'entrepreneur a choisi d'investir dans le troupeau de son ami éleveur aveyronnais et lui achète son lait d'hiver sans négocier le prix. En échange, il bénéficie de la priorité sur les volumes produits.

Le pari de la grande distribution

Bien que « haut-de-gamme », l'entreprise de 6 salariés fait le pari de s'adresser à la grande distribution. Une grande distribution soucieuse de diversifier son offre en y ajoutant davantage de produits qualitatifs et arborant le drapeau bleu blanc rouge.

Une seconde marque - Maison Simone- est néanmoins été créée à destination des clients historiques d'Alain Leon : les épiceries fines et les restaurants. « Nous leur proposons un choix plus large et des volumes plus petits ». Avec une difficulté : le moindre équipement en congélateurs des ceux-ci auquel l'entreprise choisit de remédier petit à petit.

Lancée en juillet 2021, la commercialisation prend de la vigueur en 2022, portée par une plus forte visibilité médiatique. Notamment dans le cadre du festival de Cannes au cours duquel l'actrice Eva Longoria vante les qualités de la glace.

A ce jour, les glaces et sorbets de Maison La Cornue sont distribuées dans 200 points de vente des enseignes Carrefour, Leclerc et Intermarché. « Nous prévoyons de réaliser entre 800 000 et 1 million d'euros de chiffre d'affaires cette année ». Avec un objectif de 3 millions d'euros à l'horizon 2025.

Convaincre le public

Pour y parvenir, il faudra faire face à plusieurs défis parmi lesquels la difficulté à recruter dans l'industrie, et notamment dans l'agro-alimentaire.

Mais aussi « le manque de reconnaissance et de légitimité du lait de bufflonne. Les gens ont l'impression que nous proposons de la glace à la mozzarella ». Reste donc à susciter l'appétit des plus perplexes grâce à une gamme de glaces toujours plus appétissantes auxquelles devraient progressivement s'ajouter d'autres produits, tels que des macarons. Preuve que la bufflonne n'a pas fini de surprendre nos palais.

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