Les Jouets du Queyras, victime collatérale de la fermeture des stations de ski

Installée depuis 1920 à Arvieux dans les Hautes-Alpes, cette TPE fait partie des rares fabricants de jouets français. Sa spécialité : le bois, qu’elle achète à des fournisseurs locaux. Très dépendante de l’activité de la station de ski voisine, elle a passé un hiver très rude qui rend son avenir incertain.
(Crédits : DR)

L'année 2020 avait pourtant bien commencé. Les 18 et 19 janvier, l'Elysée organise une exposition dédiée aux produits innovants de fabrication française. Les jouets du Queyras y ont une place. Représentant ainsi fièrement leur département. Elle y présente ses élé-cubes, petits éléphants colorés qui s'empilent, formant une drôle de pyramide. Un produit qui incarne la volonté de l'entreprise de se moderniser, tout en défendant son patrimoine et son histoire.

Fabrication artisanale à partir de bois local

Les Jouets du Queyras naissent en 1920. Sous une forme très innovante pour l'époque puisqu'il s'agit une Scop, où tous les travailleurs ont un pouvoir de décision. « Il y avait la volonté de donner du travail autre que l'agriculture, quelques mois par an », raconte celle qui reprend l'affaire en 2013, Giovanna Graziosi.

Au départ spécialiste des figurines représentant tantôt la Nativité, tantôt les animaux de montagne, l'entreprise choisit ces dernières années de moderniser son offre en proposant des couleurs pastels et des jouets plus complexes comme des casse-tête ou des jeux d'équilibre. 139 références au total, fabriquées à partir de bois local provenant de deux pins typiques de la région. La fabrication est ensuite entièrement réalisée par l'entreprise.

Les clients sont, pour l'essentiel, des touristes de passage à la station de ski voisine. « Nous sommes situés sur la route qui y mène et nous sommes aussi très présents sur les réseaux sociaux ». La TPE profite du regain d'intérêt pour des jouets artisanaux, plus qualitatifs et différenciant. « Les gens aiment aussi acheter des choses qu'ils ont vu être fabriquées lors des visites d'ateliers que l'on organise ».

Une vente 100 % directe. Car l'entreprise ne travaille avec aucun revendeur, ses coûts de fabrication étant trop élevés pour être gonflés par des coûts de distribution supplémentaires.

« Sans les remontées mécaniques, personne ne vient ici »

Alors lorsque le confinement est annoncé en mars, elle se retrouve particulièrement démunie. « Nous avons été obligés de fermer, tout comme nos fournisseurs. Cela a bloqué toute la production en avril et mai ». Malgré tout, l'été est plutôt bon. L'entreprise pense repartir du bon pied avant que ne sonne le second confinement, marqué par la fermeture des remontées mécaniques. « Ici, nous sommes au milieu de nulle part. L'été ça va. Mais l'hiver, la route est souvent bloquée. Sans les remontées mécaniques personne ne vient ».

Les ventes en ligne augmentent (+ 20 %), mais elles demeurent marginales : 6000 euros sur l'année, pour un chiffre d'affaire qui s'élève habituellement à 150 000 euros.

Résultat : une perte de 20 000 euros. « Mais nous n'avons pas eu droit au fonds de solidarité parce que nous produisons nous-mêmes ce que nous vendons. On nous a dit : vous n'avez qu'à réduire votre production. Tout ce qu'on nous propose, c'est le Prêt garanti par l'État. Mais endetter encore l'entreprise, je ne me sens pas. On ne sait pas ce qui va se passer ».

Giovanna Graziosi, qui est seule salariée à l'année et embauche ponctuellement des saisonniers, a dû renoncer à ses projets de recrutement. De même qu'à son envie de proposer de nouveaux jouets pour enrichir et moderniser son catalogue.

Habituellement, les rentrées d'argent du début d'année lui permettent de constituer sa trésorerie pour l'été. « Mais là, ce n'est pas possible. A moins que nos fournisseurs nous suivent, mais ils souffrent eux aussi ».

Malgré cela, elle se donne un été. « Mais si les stations sont encore fermées en novembre prochain, je ne suis pas sûre de vouloir continuer. Nous avons été mis en valeur en janvier et on nous a laissés tomber au pire moment. Je suis très déçue ».

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