Relais Vert face aux nouveaux défis du bio

Installée à Carpentras, cette entreprise familiale assure depuis 1986 la logistique entre producteurs bio et magasins spécialisés. Aujourd’hui, face à l’appétit croissant de la grande distribution pour ce type de produits et à la raréfaction des ressources, elle investit en faveur des filières locales.
(Crédits : Pixabay)

Il fut un temps où le bio était un marché confidentiel, une niche de supposés utopistes. En 1976, Jean Louis Ginart quitte le monde de la banque pour s'immerger dans cette agriculture d'un nouveau genre. Dix ans durant, il apprend les subtilités du maraîchage et assiste à l'ouverture des premiers magasins bio, l'essentiel de la distribution se faisant en vente directe. Il a l'idée de professionnaliser le secteur en organisant davantage la distribution. C'est ainsi que naît Relais vert, en 1986. "Au départ, l'entreprise ne distribuait que des fruits et légumes", explique son fils Jérémie Ginart, président de l'entreprise. "Puis se sont ajoutés l'épicerie et l'ultra frais".

Transition 2.0

L'appétit des Français pour ce type de produit grandit doucement jusqu'à la crise de la vache folle, en 1998. Un électrochoc. Le bio est de plus en plus sollicité. Relais Vert prend de l'ampleur.

En 2010, la société investit dans un entrepôt Haute qualité environnementale de 7 000 mètres carrés recouvert de panneaux photovoltaïques. Grâce au travail mené auprès de transporteurs, elle livre en 24 heures l'ensemble du territoire national. Mais tout se fait encore au crayon et papier. Ce n'est qu'en 2012 que Relais Vert prend le chemin de l'informatisation, sous l'impulsion de Jérémie et Frédéric Ginart, au moment où ceux-ci prennent les commandes de l'entreprise paternelle. C'est capital si elle veut être en mesure de répondre à une demande qui croît à toute vitesse, avec des pics à 35 % certaines années. "Nous avons engagé des informaticiens qui sont aussi développeurs. Nous utilisons un logiciel sur-mesure développé en interne. Nous sommes entrés dans la transition 2.0 du bio".

Les deux entrepreneurs font aussi le pari de l'humain. De 2012 à aujourd'hui, l'entreprise multiplie par quatre ses effectifs, passant de 56 à 250 salariés. Des recrues visant à répondre à la demande, mais aussi à se doter d'une expertise pour chacun de ses segments de marché. "Nous sommes un grossiste généraliste avec une expertise pour chaque famille de produit".

Tension sur les matières premières

Une expertise nécessaire pour faire face aux nouveaux défis de l'alimentation bio. Car depuis 1986, le marché a bien changé. Depuis cinq ans, de nouveaux acteurs sont entrés dans la danse : la grande distribution qui représente un peu plus de la moitié des débouchés du bio. Sauf qu'elle n'est pas un client de Relais Vert qui a choisi de ne fournir que les magasins spécialisés. Pour des raisons éthiques mais aussi par crainte d'être "mangé tout cru" dans une logique de baisse des prix qui passe par la réduction du nombre d'intermédiaires. La grande distribution est donc un concurrent. Face aux clients mais aussi face aux producteurs. "Des matières premières qui étaient relativement faciles à trouver auparavant se sont taries", observe Jérémie Ginart.

Pour y remédier, l'entreprise - qui affichait un chiffre d'affaire de 180 millions d'euros en 2019 - s'est engagée dans une politique en faveur des filières locales. "Nous avons créé des sociétés avec des producteurs et des éleveurs". Une ferme avicole a ainsi été montée dans le Gers. Des avances sur culture sont proposées dans le cadre du maraîchage. "Nous avons aussi investi dans une conserverie à Carpentras qui nous fait des confitures, des soupes, des bocaux de légumes". Parmi les approvisionnements à sécuriser en priorité : les céréales et les légumineuses. "On a investi dans du millet français alors que la plupart venait d'Europe de l'Est. On réfléchit aussi aux fruits secs, amandes et noisettes, qui viennent surtout de Turquie, d'Italie, d'Espagne. On a en Provence un bon terroir pour les amandes. Quant aux noisettes, il y a du potentiel en Corse". Un chantier de longue haleine, capital pour les mois et années à venir. A l'heure où la grande distribution fait du bio un argument de vente, elle en dénature parfois le sens en faisant venir de loin ses matières premières, ce qui a un impact néfaste sur l'environnement. Relais Vert veut se démarquer en montrant qu'il est possible de faire autrement.

Une démarche qui l'a également conduite à entrer au capital de Provinces Bio, un homologue nantais de plus petit gabarit, "à hauteur de 30 % pour commencer. Cela nous permettra d'être plus fort sur le Nord Ouest de la France en disposant d'une plateforme sur place pour livrer la région. Ce sera plus cohérent que d'envoyer des palettes depuis Carpentras".

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Commentaires 2
à écrit le 02/09/2020 à 17:11
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Pendant ce temps : Les dérogations temporaires prévues par la France pour permettre à ses agriculteurs de réutiliser des insecticides néonicotinoïdes, néfastes pour les abeilles, seront « réservées » à la culture de la betterave et ne pourront êtr...

à écrit le 02/09/2020 à 10:27
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