En PACA, c'est la bataille du rail

Si Provence-Alpes-Côte d'Azur a tous les atouts qu'on lui connaît, elle a aussi un énorme défaut : les transports. Et dans une région qui se veut attractive, c'est bien embêtant. Le ferroviaire surtout cristallise les tensions. Entre la Région et la SNCF, rien ne va plus. Car l'enjeu, c'est la fluidité et l'attractivité.
Il faut 2 h 30 aujourd'hui pour relier les deux grandes métropoles du Sud que sont Marseille et Nice.

C'était l'une des premières rencontres du nouveau président de la Région. À quelques jours de Noël 2015, Christian Estrosi recevait Guillaume Pépy. Entre présidents - de Provence-Alpes-Côte d'Azur pour le premier, de la SNCF pour le second - il était question de se mettre d'accord sur les doléances concernant les Trains Express Régionaux (que la SNCF gère pour le compte de la Région), notamment en termes de retard, d'annulation de trains, de jours de grève subis par les usagers, sans oublier les questions de sécurité. Une rencontre au sommet d'où il était ressorti une impression de bonne volonté de la part de l'entreprise ferroviaire. Mais cette bonne entente n'aura pas duré très longtemps. En octobre 2016, soit moins de douze mois plus tard, c'est un Christian Estrosi furieux qui « siffle la fin de la partie », comme il le dit alors, et rompt les négociations avec son interlocuteur.

« Une région attractive est une région accessible »

Il faut dire que PACA ne brille en effet pas pour l'efficacité et la ponctualité de ses TER : 20 % de trains en retard, 10 % de trains annulés, 90 jours de grève recensés en 2016. De quoi faire perdre son sang-froid à plus d'un usager. Car la conséquence majeure, c'est l'impact sur le déplacement des salariés et l'attractivité du territoire, entraînant de fait celle des entreprises qui veulent recruter des compétences.

« Une région attractive est une région accessible », rappelle Christian Estrosi en février dernier, lorsqu'il inaugure les Assises régionales des transports, dont le but est de donner la parole à tous ceux pénalisés par un rail défaillant. Des chefs d'entreprise sont présents à ces Assises, tandis que 20 % des actifs se disent gênés aux entournures par la situation actuelle.Quelles peuvent être pour autant les solutions ? La Région évoque notamment la mise en concurrence. Possible mais pour cela, il faudra attendre 2019, date à laquelle l'État le permettra. La Région a d'ailleurs promis de candidater à l'expérimentation qui précédera le calendrier.

De même, la création d'un groupement européen de coopération territoriale avec Monaco et la région voisine italienne, la Ligurie, a pour but de permettre à un autre opérateur de faire circuler les trains sur la partie azuréenne, entre Cannes et Monaco et jusqu'à Gênes, ce qui correspond aussi à des réalités de business. Et puis, il y a sans doute une réflexion à mener sur la pertinence de chaque mode de transport. La route aussi connaît des difficultés, mais le rail n'est pas toujours la solution la plus pertinente. Surtout, la vraie question est bien celle de la compétitivité d'une région qui possède de formidables atouts - et pas seulement climatiques - mais qui doit absolument régler la question des déplacements. Il faut 2 h 30 aujourd'hui pour relier les deux grandes métropoles du Sud que sont Marseille et Nice. Quand on prétend être l'une des régions de France les plus attractives, quand on se positionne comme une destination d'affaires, quand on veut relancer le tourisme, donner à voir une image de région dynamique, aux potentialités plurielles, il est nécessaire, et même indispensable, d'offrir l'ensemble des conditions pour cela.

De ligne TGV, il n'y en aura donc pas, et la Ligne Nouvelle, même si elle ne satisfait pas tous les besoins, est nécessaire pour permettre à une infrastructure vieillissante et obsolète de ne pas prendre en otage les usagers et à travers eux l'économie de celle qui joue sa place sur l'échiquier international et veut être - sans jeu de mots - une locomotive exemplaire.

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« Les transports doivent être au cœur des réflexions »

  • Entretien avec Philippe Tabarot, vice-président du conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur, chargé des transports


LA TRIBUNE - Où en sont les rapports avec la SNCF ?

PHILIPPE TABAROT - Nous avons essayé de contractualiser avec notre exploitant unique, mais beaucoup des engagements pris n'ont pas été tenus et nous n'avons donc pas reconduit en décembre dernier la convention qui nous liait. Aujourd'hui nous payons uniquement pour les trains qui circulent correctement. Il faut savoir qu'en France, le coût du TER est de 23 € le kilomètre, en Allemagne il s'élève à 15 € et en Provence-Alpes-Côte d'Azur à 27 €. Nous tenons à expérimenter la mise en concurrence et faisons du lobbying auprès des candidats à la Présidentielle, car c'est le parlement français qui décidera de l'anticipation possible de cette mise en concurrence.

Christian Estrosi avait évoqué la possibilité de passer par une mise en régie...

En effet, cela fait partie des solutions envisagées et pourrait s'inspirer des Chemins de fer de Provence. C'est une régie qui fonctionne bien [et gère la ligne qui relie Nice à Digne, ndlr], avec 430 000 passagers par an et un taux de fiabilité de 92 %. À comparer à celui de la SNCF, qui est de 75 %.

Vous avez lancé une application Usagers TER.Quelle est son utilité ?

Elle est en place depuis quelques semaines et permet de mieux informer les usagers et de leur rendre la parole. L'idée est de pouvoir communiquer directement avec eux, toujours dans un but d'améliorer la qualité du service. Chaque fois que les nouvelles technologies nous permettront de mieux dialoguer, nous y aurons recours.

Vous avez organisé début février une première conférence citoyenne. Quel était son but ?

Nous avons essayé d'aborder les questions les plus pratiques possible. Nous avons décentralisé les réunions dans les différents départements. La seconde se tiendra début avril. Nous organisons des cafés dans les gares pour rencontrer les usagers. Bien sûr, les problématiques du quotidien doivent être traitées, mais il faut aussi se projeter.

Un Schéma régional des transports est en préparation ?

Ce sera un document le plus transversal possible. Nous voulons que les transports soient au cœur des réflexions. Nous travaillons main dans la main avec les Métropoles sur ce sujet.

Propos recueillis par Laurence Bottero

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Commentaire 1
à écrit le 28/03/2017 à 12:37
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Quand est-ce qu'il y aura un veritable RER autour des villes en France. L'Allemagne, la Suisse, l'Autriche et d'autres pays en Europe ont déjà des réseaux pour les villes de plus de 50'000 habitants. La seule ville en France qui aura un tel réseau...

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