La Tribune - Vous connaissez bien Thales Alenia Space pour y avoir effectué la majorité de votre carrière. Quelle est votre feuille de route ?

Pierre Lipsky - J'ai en effet débuté à Cannes en 1994 en tant qu'ingénieur assemblage intégration sur des projets de satellites de télécommunications. En 2014, j'ai rejoint la business line Télécommunications en tant que directeur des opérations. Je connais bien Cannes et l'écosystème du monde spatial. Ma volonté est de nous ouvrir à l'extérieur. Nous vivons actuellement une transformation, l'activité spatiale n'est plus protégée, ce n'est plus une activité à part. Nous voulons être plus encore à l'écoute de nos clients, travailler en co-engineering. Le résultat n'en sera que meilleur. Les clients privés sont demandeurs de cela aujourd'hui, leur contexte change, ils ont besoin de creuser avec nous des solutions. Localement je veux donner les moyens de cette transformation. En interne, cela passe par des centres d'innovations, un Fablab (disponible d'ici six mois NDLR), permettre aux ingénieurs d'exprimer leurs idées et permettre aussi à nos clients d'être reçus parmi nous.

Et puis il y aussi les compétences. Nous aurons embauché 200 personnes au total en 2016 et cela n'est pas un point d'arrêt. Lorsque nous embauchons, nous cherchons à recruter de nouvelles compétences, issues d'autres pays ou d'autres cursus universitaires.

Comment abordez-vous l'innovation et la transition numérique ?

L'usine 4.0 c'est aussi dans le spatial. L'innovation demande d'adapter nos technologies. Elle demande aussi un changement d'état d'esprit et une capacité d'adaptation. Au-delà de la compétitivité il s'agit d'être agile, attractif et de se mettre rapidement en configuration de souplesse. Il n'y a pas que le prix, même si nous faisons la chasse aux coûts. Nous voulons aussi mieux gérer nos données pour mieux les partager.

Cannes est de plus en plus identifiée comme la ville du spatial. Le développement à quelques mètres de votre siège du projet Bastide Rouge qui regroupe déjà des start-ups et bientôt des étudiants, cela crée des possibilités de synergies ?

Bien sûr et c'est un point que je vais bientôt évoquer avec le maire de Cannes, David Lisnard.

Qu'en est-il de la concurrence ?

C'est plus difficile qu'avant mais nous connaissons nos compétiteurs qui sont différents selon les marchés. Ce qui génère encore davantage le besoin de co-engineering, de partenariats, de financements à trouver. Il faut amener une solution globale et du démarquant ce qui peut être du service, de nouvelles technologies à bord, de la sécurisation du financement.

Quels sont vos objectifs ?

Rester leader des constellations. Pour cela nous avons l'expérience. Nous avons la flotte Iridium et nous avons le projet d'autres constellations. Nous sommes aussi positionnés sur l'internet haut débit grâce aux satellites. Nos clients en ont besoin, les gouvernements veulent combler la fracture numérique et le satellite est la solution. Nous développons toute la gamme pour cela, du satellite jusqu'à l'installation du terminal utilisateur chez le client. Aujourd'hui, tout le monde veut le wifi comme à la maison, mais en gratuit.

Nous sommes également leader de l'observation à très haute résolution, de l'observation et la surveillance. En ce qui concerne la météo, nous préparons la 3ème génération.

Quid du numérique ?

Nous travaillons sur le satellite tout numérique, c'est-à-dire un satellite reconfigurable en orbite. Et pour cela il faut que les équipements soient numériques. Nous allons introduire peu à peu des parties reconfigurables. Le satellite 100 % reconfigurable sera disponible d'ici 2020.