Les ambitions « vertes » du créateur français de GetLinks

Dans une région du monde, l'Asie du Sud-Est, où les réseaux sociaux offrent toutes les fonctions de la vie quotidienne, Djoann Fal a fait fortune grâce à GetLinks, le concurrent de LinkedIn qu'il a créé pour les métiers de la tech. A peine 30 ans et déjà millionnaire, connu à Singapour comme le « Mark Zuckerberg » français, le tycoon varois se tourne également aujourd'hui vers le capital-risque dans les énergies vertes, avec de beaux projets notamment avec TotalEnergies.
(Crédits : DR)

C'étaient les débuts d'internet. Débarqué en Asie il y a dix ans, d'abord à Shanghai, pour une première expérience dans le marketing numérique chez Lazada, la première plateforme de e-commerce en Asie du Sud-Est, Djoann Fal grimpe les escaliers quatre à quatre. En 2015, il monte à Singapour avec trois associés hongkongais et thaïs sa propre plateforme, GetLinks.

A l'instar de LinkedIn dans le reste du monde, le réseau social devient rapidement la première place de marché pour l'emploi dans la tech en Asie.« Le continent asiatique est très avancé. Davantage qu'en Europe, les réseaux sociaux font vraiment partie ici de la vie quotidienne. Tout ce qui est paiement, aller au restaurant, prendre un taxi, effectuer des achats, se faire livrer des repas ou réserver un billet d'avion se fait sur les réseaux sociaux. Ils sont passés de simples messageries à des « super apps » comme le chinois WeChat qui est aujourd'hui un véritable mode de vie pour un milliard d'utilisateurs. »

Un modèle économique bien différent

Etonnement, l'anglais n'est presque pas parlé en Asie, hormis dans les milieux d'affaires internationaux. Et c'est ce qui a constitué la chance de Djoann Fal. « De ce fait, LinkedIn n'a que très peu de pénétration sur les marchés d'Asie du Sud-Est, assure-t-il. Beaucoup de professionnels qui voulaient travailler dans la tech ne connaissaient pas LinkedIn et ils ne maîtrisaient de toute façon pas suffisamment l'anglais pour y être présents. On leur a apporté un réseau professionnel dans leur langue avec des profils qu'ils pouvaient créer pour être embauchés et face à eux des recruteurs à la recherche de talents ».

A Singapour et dans la région, le fonctionnement de l'économie est bien différent de ce que l'on connaît en Europe. En général, pays par pays, cinq à six conglomérats se partagent tous les investissements et financements. « C'est comme si, en France, vous aviez uniquement Total et LVMH, résume le jeune homme, diplômé d'ESCP, et que toutes les innovations faisaient partie de leurs familles. Il faut vraiment rencontrer les bonnes personnes et accéder à ces réseaux qui vous aideront par la suite. »

Copier les modèles européens

A 32 ans, le jeune Toulonnais, né à Hyères d'un père immigré sénégalais venu faire ses études dans le Var et d'une mère parisienne, passe pour le Mark Zuckerberg français d'Asie. Le chiffre d'affaires de sa plateforme est passé de 11 millions d'euros en 2021 à plus de 20 millions l'an dernier. GetLinks revendique plus de trois millions d'abonnés. Même s'il reste présent au conseil d'administration de la plateforme, Djoann Fal est déjà passé à autre chose. Grâce aux parts dans la société qu'il a revendues, il se tourne désormais vers le capital-risque dans les énergies renouvelables.

« Je travaille par exemple avec TotalEnergies dans la région pour les aider à investir et à apporter leurs technologies. Il y a énormément d'admiration en Asie du Sud-Est sur ce qui se fait en Europe en matière d'investissement dans la transition énergétique, l'UE est perçue comme très progressiste sur beaucoup de lois, de taxes, etc... Des pays comme Singapour regardent vraiment ce qui se passe là-bas pour pouvoir copier les modèles ». Conscient des opportunités, Djoann Fal envisage d'ailleurs de réorienter sa plateforme GetLinks vers les recrutements dans les technologies vertes.

La France, un pays de cocagne

Depuis deux ans, le Français partage sa vie entre Singapour et San Francisco, en Californie. Il se verrait bien s'installer en France, mais le jeune homme estime que les opportunités professionnelles dans son secteur y sont trop limitées. En revanche, l'idée de revenir dans l'Hexagone faire grandir ses futurs enfants fait elle son chemin. « Le modèle français est très bon, reconnaît-il. Comparée aux États-Unis, la France est un beau pays où les gens sont intelligents et aimables. Mais quand on y est, on ne s'en rend pas compte. C'est quand on a vécu dans une dizaine de pays comme moi qu'on le réalise. Pour élever des enfants, c'est un des meilleurs pays au monde avec son modèle éducatif et les hôpitaux gratuits. Cependant, je sais grâce à des amis qui vivent encore là-bas qu'il y a énormément de problèmes de sécurité ».

A Singapour, une école correcte coûte en moyenne 50.000 euros l'année. Pour la première fois, Djoann Fal invitera cet été une délégation d'industriels venus d'Asie pour un séjour dans la sublime villa Rocabella au Pradet dans le Var, le domaine racheté il y a quelques années par le millionnaire Jean-Baptiste Rudelle à Port-Cros. Le fondateur de Criteo, le leader du ciblage publicitaire sur internet, veut en faire un centre de « prospective » et de réflexion pour les leaders du numérique. « L'idée, explique Djoann Fal, est de les inciter à investir pour soutenir des innovations technologiques capables d'enrayer ou de limiter le changement climatique. »

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