« Il faut réinventer les basiques de l’hôtellerie à l’aune du XXIe siècle » (Serge Trigano)

Après avoir cassé les codes de l’hôtellerie avec Mama Shelter, dont le onzième établissement français ouvrira à Nice le 13 juin prochain, Serge Trigano s’attèle à en repenser les fondamentaux à l’aune des défis du XXIe siècle, qu’ils soient environnementaux avec sa nouvelle aventure, Oh Baby, ou sociétaux, à travers l’enseigne Casa Barbara, concept destiné aux seniors imaginé pour Korian et sur lequel la famille d’hôteliers est en discussion pour reprendre la main.
(Crédits : DR)

Mama Shelter pose ses bagages sur la Côte d'Azur. Le 13 juin prochain s'ouvrira à Nice, dans le quartier de Riquier, le onzième établissement français de cette collection d'hôtels lifestyle atypique, avec ses 102 chambres, son restaurant, son rooftop avec piscine, son bar à pizza, ses ateliers et autre breakroom... L'offre niçoise au design joyeux et coloré ne déroge pas au concept lancé il y a 16 ans par Serge Trigano pour réveiller l'hôtellerie.

« J'ai l'habitude de dire que Mama, c'est un bar et un restaurant avec des chambres au-dessus, un lieu de vie, une bulle de bonheur, qui se déploie sur des sites différenciés des emplacements traditionnels où l'on peut sentir la palpitation de la ville », avance-t-il. Un concept qui est venu casser les codes du secteur à un moment où celui-ci ronronnait gentiment, et que la famille Trigano a cédé intégralement en 2021 à Ennismore, la branche lifestyle du groupe Accor.

Un hôtel locomotive

Pourtant, c'est bien Serge Trigano qui, ce 30 mai 2024, s'est déplacé en terres azuréennes pour présenter le dernier-né de l'enseigne. Aurait-il du mal à couper le cordon ? « Non, non, se défend-il. Les destinées de Mama sont entre les mains d'Accor, et même si nous continuons à avoir un rôle de consultants, notamment sur les sujets de développement, de restauration et de design, même si les liens restent étroits, le cordon est bel et bien coupé. »

A Nice, Mama Shelter vient combler un manque, celui d'une offre festive, abordable et de qualité à l'Est de la capitale azuréenne : « Un futur phare, prédit Christian Estrosi, maire de la ville, pour ce quartier niçois par excellence qui s'est senti abandonné ces dernières années avec le développement de la ville vers l'Ouest ». Ce rôle de locomotive ne déplaît pas à l'hôtelier, « c'est un peu notre ADN », qu'il entend poursuivre avec son prochain concept, Oh Baby.

Retour aux basiques

« Il reste tellement de choses à faire dans le secteur, souligne-t-il. Il ne s'agit plus tellement de casser les codes, mais de retrouver les basiques de l'hôtellerie et de les réinventer à l'aune du XXIe siècle. C'est ce que nous allons essayer de faire avec mes fils dans notre nouvelle aventure qu'est Oh Baby. » Celle-ci vise à s'emparer des préoccupations d'un secteur aujourd'hui bousculé, notamment par des considérations environnementales et des problématiques de recrutement.

« Le concept Oh Baby vise à répondre à ces enjeux en allant au maximum de ce que l'on peut faire dans chacun des segments », tout en respectant les fondamentaux de la famille Trigano, à savoir un design léché, avec des chambres « pas très grandes mais confortables » dessinées par Philippe Starck, et une bonne table. « Nous sommes accompagnés par Cyril Lignac. »

Nouveau positionnement

Avec Oh Baby, fini le lieu de vie festif à la Mama, l'enseigne revient à la fonction première de l'hôtellerie, « dormir ». Pensé à l'origine pour une clientèle économique, le modèle a été revu pour se tourner vers une clientèle plutôt orientée affaires. « Nous sommes en effet montés en gamme par rapport au discours de présentation du concept, indique-t-il. Le foncier est très cher, les coûts de construction ont considérablement augmenté ».

D'où un nouveau positionnement à la « CitizenM », une chaîne d'hôtellerie internationale néerlandaise où le luxe se veut abordable et dont le modèle de construction s'appuie sur le préfabriqué (hors site). Nice se présente-t-elle comme une destination intéressante pour cette nouvelle enseigne ? « J'en ai parlé avec M. le maire », confie Serge Trigano. Mais c'est à Milan, en 2026, que le premier établissement Oh Baby verra le jour. La commune de Saint-Ouen, en Ile-de-France, devrait suivre, « toujours dans des quartiers décalés ». On ne change pas une recette qui gagne.

Silver économie

En attendant, Serge Trigano se concentre sur la silver économie, autre grand enjeu de ce siècle. Un domaine qu'il a abordé à travers Casa Barbara, un lieu de vie non médicalisé pour seniors imaginé pour Korian, à ce jour implanté à Levallois-Perret et à Nice, sur lequel il est « en train de reprendre la main ». « Nous travaillons avec un fonds et une caisse de retraite pour développer l'enseigne autour des trois piliers indispensables pour bien vivre sa vieillesse : la restauration, saine et de qualité, la communauté pour contrer la solitude, et les activités ».

Un sujet a priori bien éloigné de l'hôtellerie. A priori seulement. « Jusqu'alors, ce sont les promoteurs immobiliers qui se sont emparés du sujet des résidences seniors, sans vraiment s'intéresser au produit. Or, le secteur de l'hôtellerie a sa légitimité dans ce domaine. Nombreuses sont les personnalités qui ont fini leur vie à l'hôtel, profitant du côté privatif de la chambre et des rencontres et partages associées aux parties communes. A notre échelle, l'idée est de proposer à la clientèle de vivre leur retraite à l'hôtel, de sortir du monde de l'ehpad pour entrer dans celui de l'hôtellerie ». Là aussi, Serge Trigano casse les codes.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.