Projets alimentaires territoriaux : Mouans-Sartoux, la pionnière exemplaire 1/2

Créés à la faveur de la Loi d’avenir pour l’agriculture de 2014, les projets alimentaires territoriaux (PAT) se sont fortement multipliés ces deux dernières années, portés par un contexte de crises multiples et successives qui a mis en évidence leur rôle clé pour développer la résilience alimentaire des territoires. L’enveloppe de 80 millions d’euros issue du plan France Relance, visant à soutenir la mise en œuvre des projets labellisés, est venue amplifier cette belle dynamique qui comptait, en avril 2022, 373 PAT reconnus par le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation. Parmi eux, 27 sont déployés ou en cours de déploiement en Provence-Alpes-Côte d’Azur où les Alpes-Maritimes tiennent le haut du pavé avec 10 PAT et une ville pionnière, Mouans-Sartoux, qui s’est penché sur le sujet dès 1998.
(Crédits : DR)

C'est une petite commune, située dans le moyen-pays grassois, coincée entre la cité des Festivals et celle des Parfums. Une superficie de 13 kilomètres carrés, 10.200 habitants au compteur, Mouans-Sartoux n'est a priori qu'une ville azuréenne parmi d'autres, avec son château du XVe siècle, sa foire aux santons et son Festival du Livre. A priori seulement. Car comme monsieur Jourdain en son temps, la collectivité maralpine a construit, à partir de 1998, son projet alimentaire territorial (PAT) sans le savoir. Cette avance fait d'elle une pionnière, exemplaire qui plus est pour tous ceux qui s'intéressent à la souveraineté alimentaire, à la relocalisation de l'agriculture, aux circuits courts et locaux, à la restauration collective, aux produits bio. En résumé, l'alpha et l'oméga de ces PAT dont l'objectif est de structurer des filières locales pour accélérer la transition agricole et alimentaire.

Prises de conscience

Retour à Mouans-Sartoux. Tout commence en 1998 donc, avec la crise de la vache folle. Plus de bœuf dans les cantines et "première prise de conscience de la problématique santé environnementale liée à l'alimentation", se souvient Gilles Pérole, adjoint au maire chargé de l'enfance, l'éducation et l'alimentation. La seconde interviendra au mitan des années 2000, à la faveur du plan nutrition santé qui pousse les collectivités à revoir l'équilibre nutritionnel des menus. Et à dresser ce constat : "Plus on servait de légumes, fruits et céréales aux enfants, plus on leur donnait de pesticides". La commune décide alors de s'orienter vers une cantine 100% bio à base de produits bruts, locaux et cuisinés maison. Un objectif atteint en 2012. Sans surcoût. Voire même une économie de 6 centimes par repas, grâce à une diminution drastique - à hauteur de 80% - du gaspillage alimentaire. Grâce aussi à la création d'une régie municipale agricole. Celle-ci salarie 3 agriculteurs qui produisent 25 tonnes de légumes bio par an, alimentant les 1.300 repas quotidiens réalisés au sein des trois groupes scolaires.

La MAED, bras armé du PAT

Cette ferme municipale représente l'épicentre de la politique volontariste d'autonomie alimentaire de Mouans-Sartoux. Installée sur un domaine de 6 hectares préemptés par la collectivité, elle accueille la Maison de l'éducation à l'alimentation durable (MEAD), à la fois service municipal, centre de formation et espace de sensibilisation, qui porte le PAT mouansois labellisé de niveau 1 en 2017, de niveau 2 en 2022. Si le premier niveau vise à identifier et à accompagner les projets émergents, le niveau 2, attribué à ce jour à une petite quarantaine de collectivités, valorise les projets opérationnels qui mettent en œuvre un plan d'actions effectives sur leur territoire. C'est dans ce cadre que la commune azuréenne a récupéré une enveloppe de 300.000 euros issue de France Relance afin de financer, entre autres, la création d'un poste d'animateur foncier afin d'accompagner la relance de l'agriculture locale pour laquelle le plan local d'urbanisme (PLU) a été modifié, passant de 40 à 112 hectares de surface agricole. Avec l'idée d'attirer de nouveaux agriculteurs pour produire des produits bio et locaux, non plus pour la restauration scolaire mais pour les habitants de la commune.

Impact mesuré

L'installation d'agriculteurs sur la commune constitue l'un des cinq grands piliers du PAT mouansois, avec l'utilisation de l'alimentation durable comme levier économique, la sensibilisation et l'éducation du public ou encore la recherche. A cet égard, différentes études menées permettent de mesurer l'impact du projet déployé depuis aujourd'hui six ans. Comme celle, financée par l'Ademe, qui montre que l'impact carbone de l'alimentation des habitants de Mouans-Sartoux est inférieur de 43% à la moyenne nationale. "Comme quoi, une politique publique de l'alimentation, par son exemplarité, l'accompagnement et l'éducation, la sensibilisation des habitants, peut donner des résultats extrêmement encourageants pour tendre vers l'accord de Paris", souligne l'élu. Lequel travaille désormais avec le CHU de Nice "et différents scientifiques" sur la mise en œuvre d'une nouvelle étude consacrée cette fois-ci à l'impact santé du projet alimentaire. Réponse attendue dans deux ans.

Diplôme universitaire

Enfin, le dernier grand pilier du PAT tient au partage d'expérience avec d'autres territoires. Là aussi, Mouans-Sartoux fait référence. Différents dispositifs ont en effet été mis en place, de la visite d'une journée à l'accompagnement au long cours, à l'image des projets nationaux (Cantines durables-Territoires engagés) et européens (BioCanteens) grâce auxquels neuf collectivités françaises et dix villes européennes ont pu mettre en place leur projet territorial alimentaire en mobilisant le levier cantine. La MAED accueille également le premier diplôme universitaire (DU) Chef de projet en alimentation durable, option collectivité territoriale, mis en place par l'Université Côte-d'Azur, qui a formé en cinq ans près d'une centaine de personnes. "85% d'entre elles ont trouvé un emploi à la suite de ce diplôme dans une collectivité pour conduire un PAT". Les graines sont bel et bien semées...

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