Coco Velten ou quand un tiers-lieu provisoire de Marseille se pérennise, participant à la construction de la ville

Situé dans un ancien bâtiment de l’État, au cœur d’un quartier prioritaire du centre de Marseille, ce tiers-lieu mélange des publics d’horizons divers en proposant hébergement social, bureaux, manifestations culturelles, ou encore cantine en circuit court. Censé être transitoire – pour une durée de 3 ans – il vient finalement de faire l’objet d’une décision de rachat par Marseille Habitat. Ouvrant de nouveaux horizons, cette fois-ci sur le long terme.
Crédit : Pauline Escot
Crédit : Pauline Escot (Crédits : DR)

« C'est la première fois à Marseille qu'un projet d'occupation temporaire devient pérenne. C'est super. Cela montre que le transitoire peut participer à la construction de la Ville », s'enthousiasme Kristel Guyon, responsable des partenariats au sein de Coco Velten.

Après des années de visibilité à court terme, le bâtiment de 4.000 mètres carrés qu'occupe Coco Velten, ancienne Direction des routes appartenant à l'État, vient d'être racheté par Marseille Habitat. Donnant aux porteurs du projet - Yes we camp, Plateau Urbain et le groupe SOS Solidarités - la latitude pour se projeter sur le long terme.

Coco Velten, c'est une aventure qui débute en 2017, sous l'impulsion de la Préfecture de région qui souhaite, à travers son Lab Zéro, expérimenter de nouveaux modèles d'action publique. A Marseille, un des enjeux majeurs est la mise à disposition d'hébergements pour les 14.000 personnes sans-abris.

En visitant le tiers-lieu des Grands voisins à Paris, la Préfecture a alors l'envie de répliquer le projet localement. Et fait pour cela appelle aux initiateurs des Grands voisins.

Ce sera finalement Yes We Camp, Plateau urbain et SOS Solidarités qui s'en chargeront, redonnant vie aux anciens bureaux de la DIR, inoccupés au moins jusqu'au 21 décembre 2021 du fait d'un contentieux sur leur prix entre la Ville - qui veut alors en faire une école - et l'État.

Puis le contentieux se résout mais la Ville a changé de bord politique. Et l'école n'est plus au programme à cet emplacement.

Havre de mixité sociale

Dans le même temps, Coco Velten a montré son intérêt. Non seulement en mélangeant des publics qui n'ont pas l'habitude de se rencontrer, mais aussi en devenant, au moment des confinements de 2020, une plateforme de solidarité qui permet à la fois d'approvisionner des familles en biens de premières nécessités et de soutenir la création artistique grâce à la mise à disposition d'espaces.

En 2021, l'échéance finale approche. Mais 80 personnes sont encore hébergées : des femmes et leurs enfants fuyant des violences conjugales, des personnes sujettes à des addictions, sortant de prison ou de bidonvilles, des jeunes éloignés de l'emploi. Des liens ont été tissés avec les structures sociales voisines. 142 bureaux accueillent 150 salariés ou porteurs de projets associatifs et entrepreneuriaux. La cantine, le toit-terrasse végétalisé, les manifestations culturelles accueillent un public de plus en plus nombreux, et varié. « La mayonnaise commençait à prendre, il aurait été dommage de tout arrêter ».

Une forte mobilisation permet d'obtenir une prolongation d'un an. Les équipes et usagers du lieu en profitent pour esquisser l'après. Parmi les options : un rachat citoyen. « Mais on s'est rendu compte que cela était trop cher, même avec des subventions. Cela aurait généré une pression économique qui aurait mis à mal nos usages, on n'aurait pas pu proposer les mêmes générosités ».

Coco Velten demande alors à la Ville de Marseille de racheter le lieu afin que celui-ci garde sa vocation publique et de le mettre à sa disposition (en passant par une mise en concurrence) à travers un bail emphytéotique à loyer modéré.

Le rachat par la Ville, forme de « reconnaissance » du travail accompli

C'est finalement lors du conseil municipal du 30 septembre 2022 que le rachat du lieu par Marseille Habitat est annoncé. Sophie Camard, la maire de secteur, expliquant alors que « la Ville entend sécuriser et pérenniser le projet dont nous voulons conserver les usages mixtes ». Une « belle reconnaissance pour tout le travail effectué », se réjouit Kristel Guyon.

Reste à préparer la suite, le temps que l'acquisition se concrétise d'ici 12 à 18 mois. « Nous travaillons avec nos usagers pour définir nos envies et coconstruire un cahier des charges. Nous avons aussi mandaté un cabinet d'architectes pour voir si nos aspirations d'aménagement sont réalisables ».

Lire aussiQuel avenir pour le tiers-lieu solidaire Coco Velten, à Marseille ?

Parmi ces envies : améliorer la résidence sociale en ajoutant petite cuisine et douche dans chaque chambre, rénovation énergétique pour passer d'un chauffage au fuel à de l'énergie renouvelable, amélioration des capacités d'accueil du toit terrasse - « plus belle vue de Marseille » assure Kristel Guyon - qui ne peut pour l'heure accueillir que douze personnes à la fois. « On aimerait aussi améliorer la cantine sociale, et l'ouvrir davantage sur la rue ». L'atelier partagé aussi a vocation à s'ouvrir plus encore, pour être accessible à tout le quartier.

Des travaux de mise aux normes seront par ailleurs inévitables. « Nous préparons une étude que nous enverrons fin octobre à la Ville ».

D'ici là, Coco Velten continue de mijoter de nouveaux services solidaires. Parmi eux, la mise en place d'une plateforme de récupération de produits frais invendus, en lien avec La Cantina, une association de lutte contre le gaspillage alimentaire. « Nous avons trouvé un local sur le boulevard Plombières pour récupérer les invendus de producteurs situés autour de Marseille. Le dernier kilomètre sera assuré par les Coursiers solidaires », association qui promeut l'utilisation du vélo comme vecteur de solidarité et d'écologie. Prouvant encore le potentiel de Coco Velten dans la transformation de la ville.

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