« Il suffit de regarder la réalité des comptes administratifs », la réponse (chiffrée) de Lisnard à Muselier (où il est question d’équité financière régionale)

Entre le président de la Région Sud et certains élus de droite - le maire de Cannes en tête – rien ne va plus. Au point que le second dénonce publiquement et chiffres à l’appui le manque d’équité du premier dans le financement de projets de diverses communes du territoire. Et de proposer pour mettre tout le monde d’accord, de mener un audit et de créer un observatoire de l’équité. Le tout dans un souci, dit aussi le président de l’AMF, d’éviter une certaine fracture territoriale.
(Crédits : DR)

Depuis quelques mois, il y a les piques et petites phrases assassines, par réseaux sociaux interposés notamment. C'est peu dire que l'on sentait poindre une certaine tension entre, d'un côté le président du conseil régional Provence Alpes Côte d'Azur, Renaud Muselier, et de l'autre, certains élus dont David Lisnard, le maire de Cannes mais tout autant celui de Mandelieu-la-Napoule, Sébastien Leroy ou celui de Saint-Raphaël, Frédéric Masquelier, sans oublier le député Eric Ciotti - lancé dans la course à la présidence du parti LR - et le président du Département des Alpes-Maritimes, Charles-Ange Ginésy.

Une tension politique - mais on y reviendra - mais qui se traduit sur le terrain économique. Avec des dommages collatéraux , et c'est bien de cela dont il s'agit.

Les chiffres, les chiffres, rien que les chiffres

Décidé à en finir avec le dialogue de sourds, le maire de Cannes, David Lisnard, par ailleurs président de l'AMF, a choisi de mettre cartes sur table. Et les chiffres, avant tout.

« Notre objectif n'est pas d'alimenter des polémiquesNotre devoir est d'objectiver les faits, sans guerre de chapelle. Et d'en sortir par le haut ».

Les chiffres ce sont par exemple ces 5,1 milliards d'euros annoncés, à Toulon, par le Premier ministre et le président de la Région Sud, Renaud Muselier dans le cadre du Contrat d'Avenir, le 5 janvier 2021. 5,1 milliards mais au final et à aujourd'hui, zéro euro pour Cannes comme pour Mandelieu-la-Napoule. Et les agglomérations auxquelles elles appartiennent, pas davantage. Alors qu'au vu de leur nombre d'habitants, elles auraient pu recevoir 157,2 millions d'euros pour l'une (Cannes Pays de Lérins) et 114,40 millions d'euros pour l'autre (Estérel Côte d'Azur Agglomération).

Il y a aussi, les 942 525 euros en suspens liés aux travaux de lutte contre les inondations menés par Cannes Pays de Lérins, inscrits dans le Contrat régional d'équilibre territorial (CRET), le 1,8 million d'euros attendu pour contribuer au renouveau urbain des Allées de la Liberté, à Cannes, chantier qui en est à sa troisième phase. A Mandelieu-la-Napoule, aucun dossier majeur n'a été aidé, souligne son premier magistrat, Sébastien Leroy, ni giratoire, ni projet de réaménagement urbain, ni le projet Grand Capitou en attente des 2,6 millions d'euros votés... mais pas attribués.

« Le Palais des Festivals et des Congrès, premier de France en chiffre d'affaires devant la Porte d'Auteuil n'est plus reconnu d'intérêt régional », se désespère David Lisnard qui pointe une autre problématique, l'impossibilité pour le pôle métropolitain - constitué des villes de Cannes, Grasse et Antibes et du Département des Alpes-Maritimes - de faire inscrire leur projet de création d'unité de valorisation énergétique de déchets à Cannes dans le SRADDET, le Schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires. « Je ne demande même pas d'aide financière, mais administrativement, ce projet doit être inscrit au SRADDET et on nous dit qu'il ne le sera pas ».

Il n'y a pas que les travaux de renouveau urbain ou d'embellissement qui sont concernés. Côté culture et sport, c'est aussi la panne sèche, du festival CanneSeries qui percevait une subvention de 150.000 euros par an à l'association Cultures du Cœur, tournée vers l'insertion sociale qui ne reçoit plus les 11.200 euros nécessaires à sa continuité. Laquelle est désormais menacée.

Dans le Var, Frédéric Masquelier, pas plus adepte de la langue de bois, estime que Renaud Muselier à « l'art de mélanger les pommes, les poires et les oranges ». Et de confondre, « ce qui a été voté versus ce qui a été versé ».

De la question politique à la question économique

Des chiffres et des faits qui pointent un manque de soutien à des projets de développement économique, qu'ils soient de nature à répondre à une attractivité territoriale, à une protection des biens et des personnes, à un support culturel et sportif...

« Nous voulons mener de vrais projets de développement », insiste David Lisnard qui indique, aussi contre-intuitif que cela puisse paraître, que les relations étaient plus saines du temps de la présidence assurée par le PS Michelle Vauzelle. « Nous voulons la normalité, le respect des contribuables, le respect des projets », réitère le maire de Cannes. D'où cette suggestion de faire réaliser un audit concernant l'attribution des subventions régionales mais de créer aussi un observatoire de l'équité, constitué de personnalités qualifiées et indépendantes, histoire d'éviter toute polémique, quelle qu'elle soit, à l'avenir.

Comme de se pencher sur le cas de ce CRT Côte d'Azur, né parce qu'il fallait un Comité régional du tourisme qui défende aussi bien la Côte d'Azur que La Provence - « deux marques fortes », plaide David Lisnard, et que le faire depuis Marseille ce n'est pas simple. Un CRT Côte d'Azur menacé de disparition... et à qui la subvention régionale attribuée a déjà été supprimée.

Car si les désaccords entre le président de la Région Sud et certains élus se cristallisent sur le terrain économique, la vérité - et le fondement - est ailleurs, sur le terrain politique. Certes il y a eu l'épisode élections régionales, où Renaud Muselier s'est plaint d'un soutien un peu trop « mou » de la part de David Lisnard. Lequel rappelle qu'il a bien appelé à voter pour le président sortant au second tour.

A cela s'ajoute la mésentente entre Eric Ciotti et Christian Estrosi, de notoriété publique. Entre le député - en pleine campagne pour l'élection à la présidence du parti LR - et le maire de Nice, président de la Métropole Nice Côte d'Azur et président délégué de la Région Sud rien ne va plus. Et depuis longtemps. Vendredi 14 octobre, Renaud Muselier lancera son propre parti, « Nos territoires d'abord ». Une naissance qui ne plaît pas forcément. « Créer un Observatoire est plus que jamais nécessaire. Il ne faudrait pas que ce parti devienne un club-services », dit Frédéric Masquelier, le maire de Saint-Raphaël qui craint un amalgame. Surtout, il ne faudrait pas que tout ce qui peut paraître tambouille politicienne et cuisine interne ne vienne gâcher le fabuleux potentiel économique d'une région attractive certes mais qui possède encore - d'autant plus dans le contexte concurrentiel mondial - et comme le veut la formule consacrée « des marges de progression ».

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