thecamp : une reprise, des projets et (enfin) un futur ?

Il s’est présenté avant même son inauguration comme le campus du futur. Mais c’est un futur contrarié qui concerne le projet imaginé en 2013 par Frédéric Chevalier, disparu avant le lancement officiel en 2017. Percuté par la crise, le modèle envisagé n’a pas davantage trouvé un véritable positionnement, au point d’être en difficulté et d’être aussi l’objet de trois projets de reprise. Capables de donner un vrai avenir au lieu ?
(Crédits : DR)

C'est le campus où devait s'imaginer le monde de demain, entre disruption et réflexions sur le futur de l'humanité, transdisciplinaire et transgénérationnel. Pensé, imaginé, conçu et surtout porté par l'entrepreneur Frédéric Chevalier, qui avait été déjà suffisamment visionnaire pour comprendre que le marketing et les nouvelles technologies allaient bien ensemble, fondant dans les années 90 le groupe High Co et devenant alors le plus jeune dirigeant d'une entreprise cotée en Bourse.

Une vision qui ne s'impose pas

thecamp c'était son bébé, son projet phare, au point de prendre son bâton de pèlerin pour convaincre le monde entreprenarial local et même au-delà du bien-fondé de son projet, de la nécessité d'avoir en Provence un lieu unique, jamais vu encore, qui serait un haut-lieu de réflexion et d'innovation.

Un Frédéric Chevalier qui avait convaincu grandes groupes et établissements bancaires, 18 partenaires fondateurs publics et privés tels Accor, Sodexo, le Crédit Agricole, Vinci Construction ou Air France, entre autres, de le suivre.

Sa disparition en 2017 à quelques jours de l'inauguration officielle du lieu a changé la donne et thecamp s'est développé en essayant de conserver la vision de son fondateur mais sans que cette vision ne s'impose. La crise sanitaire n'a, évidemment, pas facilité la venue sur place de groupes de réflexion, ni la fréquentation de façon globale, tout court.

Alors arrive ce qui devait arriver, thecamp s'est retrouvé en cessation de paiement voici un an, entraînant une restructuration de la dette, menée par le Crédit Agricole Alpes Provence et son directeur général, Serge Magdeleine, à hauteur de 5 millions d'euros.

Mais douze mois plus tard, ça ne va pas mieux et thecamp fait désormais l'objet de plusieurs projets de reprise. Trois exactement. Tous différents.

Plutôt industries culturelles et créatives ?

Avec Whatthecamp, Ashargin Poiré et son associé imaginent un endroit dédié aux industries culturelles et créatives. Un projet qui, explique le fils du réalisateur Jean-Marie Poiré, soit capable de « faire venir des talents avec de réelles expertises ». Le sujet des industries créatives est un vrai sujet de filière, laquelle, fait face à une concurrence féroce mais surtout très bien structurée de la voisine occitane, Montpellier. Ici il est question de NFT, de jeux vidéos, d'UX, d'animation, de studio de post-production. Et de formation, car l'idée d'Ashargin Poiré c'est de permettre aux talents de trouver de l'emploi sur tout le territoire de Provence-Alpes-Côte-d'Azur, c'est-à-dire à Aix-en-Provence, à Marseille, mais aussi à Arles ou Nice. « Il faut des écoles et des métiers ». Ashargin Poiré qui explique proposer « une offre complète » assortie des labels green qui vont bien et qui permettent des tournages durables grâce à des partenariats noués avec Ecotonia - qui se présente comme un cabinet d'expertises naturalistes et d'ingénierie environnementale - ou Sekoya, qui conseille le secteur audiovisuel pour des tournages respectueux de l'environnement. Des partenaires pourraient rejoindre le projet, comme le spécialiste de matériel lumière, Transpalux, présent à Nice et Marseille. Ou comme la famille de Marcel Pagnol. Ou encore, mais ce sont des idées, Canal Plus ou Microsoft. « Nous voulons apporter cette expertise, cette connaissance et cette passion », dit encore Ashargin Poiré. Qui rappelle que le nombre de tournages dans le Sud a progressé de 37% en une année et qu'il faut donc les services et moyens adéquats pour accompagner cette croissance. Et les millions d'euros de retombées qui vont avec. Au volet purement culturel et cinématographique, s'ajoute un volet hôtelier - dont un 4 étoiles luxe - et de restauration accompagnés de la création d'un country club et d'un club d'entreprises. L'un des objectifs étant de générer des revenus locatifs. Pour cela, Ashargin Poiré espère obtenir l'exploitation des deux terrains adjacents à thecamp. Seule solution, dit le professionnel du cinéma, pour absorber la dette. Laquelle dette est l'un des vrais sujets de la reprise. Envisagée, la création de « 300 à 800 emplois ».

Ou plutôt formation et innovation ?

La formation, c'est aussi le socle du projet peaufiné par Hervé Estampes. Ce Marseillais, ex-directeur général de l'AFPA entre autres fonctions, aujourd'hui co-président de Graduate, cabinet de conseil en formation pour les entreprises notamment, filiale du cabinet de conseil Leyton - qui revendique un portefeuille composé de clients tels Hertz, Amazon, Alain Afflelou, Nature & Découvertes... - a imaginé « un lieu de solutions compétences », proposant formation continue et formation initiale, sous l'angle de l'innovation pédagogique et du numérique. Soulignant au passage ne pas dénaturer l'esprit originel de thecamp. Associé dans l'aventure, se trouve le fonds d'investissement Oaktree. Hervé Estampes qui compte poursuivre l'activité événementielle, regroupée sous le vocable The Good Place, y ajouter Maya, une plateforme de savoirs dédiée aux salariés, installer aussi l'Ecole de la transition écologique, associé sur ce point avec le Groupe SOS, créé par un autre Provençal, originaire d'Aix-en-Provence, Jean-Marc Borello. Hervé Estampes qui veut ainsi permettre aux écoles fonctionnant sur un modèle distanciel de pouvoir ici se réunir en « vrai » afin « de permettre de capitaliser et s'intégrer dans la proximité des entreprises ». Et qui prévoit de développer l'esprit thecamp sous licence aux écoles en volonté de mettre de l'innovation dans leur modèle. Un volet hôtelier est également prévu, mais orienté vers des touristes « verts » et bien sûr qui prévoit l'hébergement des visiteurs du lieu, stagiaires et autres. Avec l'hôtellerie va son pendant, la restauration. L'inspiration venant alors de La Villa des Chefs, concept déployé à Aix-en-Provence en réunissant des chefs pour des cours de cuisine particuliers, une Villa qui a par ailleurs développé son Institut de formation. Ici, elle serait susceptible de proposer une restauration originale. Sur la table, Hervé Estampes met 20 millions d'euros, 16 millions d'euros en investissement direct et 4 millions d'euros de chiffre d'affaires généré.

Le projet inconnu

Et puis il y a le projet au long cours de Kevin Polizzi. Le seul qui ne dise mot. Un projet qui a bénéficié longtemps d'une exclusivité. Le fondateur de Jaguar Network, revendue depuis à Xavier Niel, a, ces dernières années, développé moult projets autour du numérique, de la smart city, de la santé et de la transition écologique. Dire ce que contient son projet ne peut que s'appuyer que sur l'imagination, l'entrepreneur a depuis fait émerger Unitel Smart Building qui regroupe les activités immobilières telles Quanta (orientée santé) ou Theodora (ville intelligente), structure créée en 2014. Un Kevin Polizzi qui joue la carte du mystère mais qui est, des trois projets se positionnant en projet du futur, le plus ancien, chronologiquement parlant.

Il faut dire que l'enjeu n'est pas anodin. Ni pour ce qui est du montant de la dette - qui s'élève à plus de 40 millions d'euros - ni pour le devenir du lieu suffisamment atypique pour ne pas se couler dans n'importe quel projet. thecamp, cinq ans après son lancement, se cherche donc encore un avenir. Durable.

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