Dans les Hautes-Alpes, les sports d'hiver sont de loin les activités reines et font la réputation du territoire. Pourtant, au pied des Ecrins ou du Queyras, le lac de Serre-Ponçon joue aussi son rôle dans l'attractivité économique du département. Il revendique même 40% de la fréquentation touristique estivale. Le barrage, qui souffle sa 63e bougie, représente plus que des simples turbines mais joue aujourd'hui le rôle d'un vrai lieu de vie. "En 2008, nous avions 18 prestataires autour du lac, désormais il y en a 82", se réjouit Victor Berenguel, maire de Savines-le-Lac et président du syndicat mixte d'aménagement du lac de Serre-Ponçon (SMADESEP).

Une explosion qui coïncide avec la volonté des collectivités de mettre les pieds dans le lac. Car sur place ce sont bien elles qui s'occupent de l'aménagement des lieux. Le syndicat réunit les départements des Hautes-Alpes et Alpes-de-Haute-Provence ainsi que les communautés de communes de l'Embrunais, du Savinois Serre-Ponçon et du pays de Serre-Ponçon. S'il existe dans les faits depuis 1997, il a pris son véritable essor en 2008 après la signature d'une convention avec EDF, concessionnaire du barrage et donc du lac. Un accord qui a permis de combiner les usages. L'exploitant continue bien sûr sa production d'énergie mais il s'engage aussi de maintenir un niveau suffisant pour que les activités touristiques puissent s'y dérouler en sécurité. Ce qui forcément attire l'attention.

En faire une destination nautique

Auparavant, le syndicat subventionnait les activités sur place, désormais il choisit celles qui peuvent s'installer. On y trouve désormais de quoi y camper, pêcher, faire de la pêche, du bateau, du paddle ou encore prendre les airs avec un hydro-ULM. La dizaine de ports autour du lac compte au total 1.500 anneaux. "Nous avons l'agrément port propre et huit plages avec le pavillon bleu", souligne Victor Berenguel. Tout pour faire de Serre-Ponçon une destination nautique, l'objectif de l'aménageur. Toutes ces activités permettent au SMADESEP de boucler un budget largement alimenté en fonds propres.

Le syndicat prévoit notamment l'ouverture d'une ferme aquacole. La pêche de loisir est un élément important du lac car cette activité peut se poursuivre l'hiver. "Nous voulons que cela se développe de manière plus importante", confirme l'élu qui fixe le plafond à 100 prestataires maximum, "il faut pouvoir accueillir dans de bonnes conditions", poursuit Victor Berenguel.

L'avenir et le réchauffement climatique

Car Serre-Ponçon veut garder son aspect nature. Un paradoxe a priori puisque le lac est artificiel, mais sur ses 91 kilomètres de rives seulement 11 peuvent être aménagés soit 12%. Le ratio est largement inférieur à ce qui peut se faire autour de célèbres lacs naturels. Cette limite répond à la stratégie du syndicat qui veut offrir un espace où depuis des parties aménagées il est possible de rapidement se retrouver dans un lieu sauvage.

L'autre enjeu pour le SMADESEP est d'anticiper le réchauffement climatique. Ce dernier pèse sur la quantité d'eau dans le lac à cause du niveau de neige plus faible dans les montagnes. La hauteur d'eau doit être à 780 mètres (le niveau 0 étant celui de la mer mesuré au marégraphe de Marseille) avec un minimum de 775 mètres. Durant l'été 2019, le niveau avait fortement diminué obligeant certains professionnels à cesser les activités et aux baigneurs à s'aventurer à la limite du remblai. A cela s'ajoutent les besoins énergétiques en aval appelé à évoluer. Concrètement, l'aménageur réfléchit à rallonger les plages pour les anticiper des baisses du niveau de l'eau plus importantes que prévu aujourd'hui. Cela vaut également pour les pontons. De quoi modifier (un peu) l'aspect d'un atout économique majeur.