« Relocaliser en France a été le challenge de ces deux dernières années » (Jean-Pierre Blanc, Malongo)

Elle est depuis 1992 la référence du café équitable. Un défi à l’époque, un positionnement hyperstratégique aujourd’hui qui lui permet de dérouler sa feuille de route et de prendre sa part dans le mouvement de relocalisation tant désiré. Après avoir géré sans casse le virage délicat de la crise du Covid, le torréfacteur s'ouvre désormais des marchés, tout en misant sur le 100% français pour sa production.
(Crédits : DR)

Jean-Pierre Blanc le dit lui-même, il est « tombé dedans dans les années 90 ». Dedans, c'est dans le chaudron du café équitable. Un pari osé à l'époque - payer le café plus cher au producteur - mais le thème s'est imposé à tous, donnant raison au flair du directeur général du torréfacteur basé à Carros. Un choix qui porte son développement et aide à définir la stratégie. « Nous avons développé un système de doses en papier naturel, individuelles, les seules du marché en papier, sans aluminium, sans plastique. Elles sont produites à Carros, nous en faisons 300 millions par an. Nous avons des machines expresso pour les ménages qui étaient auparavant fabriquées en Chine. Nous avons décidé de les relocaliser. Nous avons fait de la recherche et du développement à La Gaude. Nous avons décidé de simplifier la machine pour diminuer le nombre de pièces, pour qu'elles puissent être produites à des coûts raisonnables et pouvoir les rapatrier en France. Cela a été le challenge de ces deux dernières années. »

De l'intérêt de sous-traitants qualifiés pour relocaliser

Si Malongo a réussi le challenge compliqué de la relocalisation, il n'a pu le faire en terre azuréenne, son berceau. « La Côte d'Azur n'est pas une terre d'industrie », regrette Jean-Pierre Blanc. « L'intérêt est d'avoir sur un même territoire un certain nombre de sous-traitants. En Vendée, (où la machine est produite NDLR), il existe tout un réseau de sous-traitants qui font de l'injection plastique, du métal. Ce qui permet de travailler en local sur un rayon de 30 à 40 kilomètres. C'est ce que nous avons privilégié. »

Le torréfacteur azuréen qui, s'il n'a pas été moins secoué par les conséquences de la crise, a néanmoins négocié celle comme une opportunité et non comme une contrainte. « La crise a été compliquée mais nous avons la chance d'être assez diversifiés. Nous vendons en grande distribution, à l'hôtellerie, à l'exportation. Nous avons des boutiques, les Malongo Café. Nous avons pu traverser la crise malgré des fermetures d'établissements pendant quasiment cinq mois en 2021, comme dans l'hôtellerie et la restauration. Nous avons travaillé, nous avons aidé les équipes, nous avons restructuré, nous avons cherché de nouveaux clients. Nous avons traversé la crise avec, heureusement, peu de dégâts. C'était compliqué, mais grâce à toutes les équipes nous n'avons pas arrêté de produire. Souvent c'était 24h/24. Il fallait faire les rotations, avec les risques de cas Covid. Tout cela a été bien maîtrisé. »

Autonomie et qualité pour fortifier les coopératives

Renforcé plus qu'affaibli, le leader du café éthique regarde vers l'avenir et maintien ses axes forts de développement. « Nous avons deux collaborateurs qui sont ingénieurs agro. Nous travaillons sur le développement de filières, mais très en amont. Ce sont des programmes sur dix ans. Nous organisons, nous structurons pour permettre à la coopérative d'être autonome en matière économique et de produire un café de qualité. Nous montons un laboratoire qualité sur place. Et nous assurons des approvisionnements à un prix supérieur au prix du marché. Pendant les cinq dernières années, nous avons payé quasiment le double du prix du marché. C'est un amortisseur pour les coopératives et les paysans. »

Malongo est implantée en Asie, au Laos, en Birmanie, ou en Afrique, au parc des Virunga (Est de la République démocratique du Congo). « En Bolivie nous avons aussi un beau programme. Les agriculteurs là-bas n'avaient pas de revenus, ils cultivaient de la Coca car ils étaient misérables et étaient chassés des villes. Il n'y a pas de culture, pas de possibilité de fabriquer des produits car les routes sont très mauvaises. Depuis deux ans, nous travaillons à préparer une coopérative de 800 personnes, sur 800 hectares. Le but est de constituer une autonomie avec ces paysans en les aidant à faire de la qualité, en préservant l'environnement. Nous leur achetons le café à un prix plus élevé qui leur permet d'avoir un revenu équivalent à celui de la Coca. C'est bénéfique pour les territoires et les paysans qui ne pourraient pas s'en sortir individuellement. »

Valoriser à l'export la marque... et le territoire

L'entreprise azuréenne, qui exporte déjà dans 25 pays, continue à se développer tous azimuts. « Quand nous le pouvons, nous le faisons. Nous sommes déjà présents aux Etats-Unis, dans la région de New-York. Nous déployons beaucoup d'activité dans l'hôtellerie et la restauration. Nous sommes présents dans les Emirats, à Dubaï. Nous sommes présents en Asie, même si cela a été plus compliqué durant la période du Covid, car les pays se sont refermés. Nous développons aussi des boutiques, comme celles de Nice, en Master franchise à l'étranger. Nous avons monté une Master franchise aux Philippines, une sacrée expérience pour les équipes. Mais aussi en Géorgie, à Tbilissi (la capitale, ndlr). C'est un établissement de 300 m2 pour valoriser la torréfaction, le café, la marque. Nous avons aussi monté en même temps une boulangerie, une petite restauration avec quelques produits français pour valoriser la France car je suis toujours attaché à mon pays.»

Si Jean-Pierre Blanc est attaché à son pays, il l'est indéniablement à sa région. Il a ainsi saisi au vol la marque « Côte d'Azur France » promue par le Comité régional du tourisme Côte d'Azur. « Ce produit est sympathique car il y a des petites fleurs de bigaradier, avec des notes un peu jasminées, comme on retrouve dans certains cafés d'Ethiopie. C'est un clin d'œil, et un produit qu'on vend à l'export. »

Un décideur économique, invité chaque semaine

Pour rappel, depuis ce début novembre, La Tribune et BFM Nice s'unissent pour proposer chaque semaine une chronique éco, baptisée Marseille Business, qui décrypte l'économie du territoire, ses enjeux, ses défis, les réussites et les problématiques. Tous les mardis, un invité vient apporter son éclairage sur une thématique précise.

BFM Nice Côte d'Azur est à retrouver sur le canal 31 de TNT régionale et sur les box au canal 285/518 (SFR), 374 (Orange) et 360 (Bouygues).

La chronique est animée par Celine Moncel pour BFM Nice et Laurence Bottero, rédactrice en chef du bureau Provence Alpes Côte d'Azur du quotidien économique La Tribune.

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