Eric Boullier – DG Grand Prix de France : « Le modèle économique a été revu de manière frugale »

De retour sur le circuit du Castellet après une édition 2020 annulée pour cause de crise sanitaire, le Grand Prix a forcément dû adapter son business modèle à la situation particulière, ce qui ne se fait pas sans innovation, comme l’explique son directeur général. Un événement sportif qui pèse aussi beaucoup dans l’économie locale, notamment parce que 90% de ses fournisseurs sont implantés dans le Sud. Et le sujet de l’impact sur le territoire va bien au-delà de la simple visibilité.
(Crédits : DR)

Après un an d'absence, Le Grand Prix de France revient au Castellet et le vrombissement ce 20 juin des monoplaces sur le circuit Paul Ricard ne fait pas que la joie des amateurs de Formule 1. Il contente un territoire tout entier, notamment les TPE PME régionales, fournisseurs habitués. Cette nouvelle édition contente aussi Eric Boullier, qui vit ainsi son premier Grand Prix de France en tant que directeur général, aux manettes depuis début 2020.

Un Eric Boullier qui, s'il connaît parfaitement le monde de la course automobile, a relevé le défi de préparer et organiser un Grand Prix dans des conditions inédites. Ce qui n'est pas sans défis et sans obligation de faire preuve d'imagination. D'innovation aussi.

Car un Grand Prix, c'est comme une entreprise. Il faut un business-modèle équilibré et l'exercice n'est pas aisé lorsque des restrictions sanitaires empêchent la principale source de revenus - c'est-à-dire la billetterie - de faire le plein. La billetterie qui, en conditions « normales » rapporte 16 millions d'euros. Une jauge habituelle remplie à 80% suffit au bon équilibre économique. Sauf que pour l'édition 2021, seuls 15.000 spectateurs sont attendus. Ils étaient 140.000 en 2019.

Quel modèle 2021 ?

Un petit caillou dans la chaussure qui a obligé Eric Boullier à revoir le modèle initial. Un modèle qui intègre d'autres sources de revenus notamment les aides financières apportées par les collectivités à hauteur de 13 millions par an, mais aussi les hospitalités secondaires, les droits de food and beverage et les partenaires sponsors pour à peu près 5 millions d'euros.

Comment donc trouver l'équilibre ? En anticipant et en optimisant. Anticiper, cela s'est fait sur le nombre de personnes à accueillir. « Dès octobre 2020, nous avons fait le choix de définir la jauge à 15.000 spectateurs », explique Eric Boullier. « Nous sommes partis de cette stratégie car cela nous permettait d'augmenter ou revoir cette donnée à la baisse selon les besoins et surtout, cela m'a permis de dimensionner le projet ». C'est notamment dans la partie promotion et publicité que des coupes plus sévères ont été faites. Et le budget, amputé donc d'une partie importante de sa ressource première (mais pas que), est porté pour cette édition somme toute spéciale, à 60% du budget habituel. « Le sponsoring direct est très marginal », ajoute également Eric Boullier. Bref, pour - sans jeu de mots - tenir la route, le budget a été remanié en étant « plus frugal et moins ambitieux ». Mais pas pour rien. Car il en restera sans doute quelque chose...

78 millions d'euros de retombées éco hors Covid

Le Gand Prix du Castellet, comme on appelle aussi l'épreuve, agit par ailleurs comme un levier économique majeur pour le territoire. Pas seulement celui du Var, où est implanté le circuit dirigé par Stéphane Clair mais pour toute Provence Alpes Côte d'Azur. En matière d'image, d'attractivité, de recours aux entreprises locales, c'est un véritable écosystème que nourrit la manifestation. C'était d'ailleurs l'un des arguments avancés lorsque le Grand Prix a retrouvé le circuit Paul Ricard après dix années d'absence. Un impact qui a également été mesuré par le cabinet Deloitte en 2018, après la première « nouvelle » édition. Une étude qui démontrait que les dépenses liées à l'aménagement et l'organisation s'élevaient à 5 millions d'euros, ajoutées aux dépenses touristiques, elles généraient ensemble 46 millions d'euros. En comptabilisant les effets indirects et induits, c'est 78 millions d'euros qui étaient injectés au total sur le territoire. Avec, en sus, la création ou la stabilisation de 550 CDI ETP.

Alors certes, cette année, ce sera moins. Mais pour les entreprises locales, qui sont des fournisseurs récurrents, c'est la bouffée d'oxygène qui n'était presque plus espérée. La diffusion télévisée est aussi - au-delà de l'audience - une fenêtre ouverte sur le territoire, d'autant que la silhouette graphique particulière du Paul Ricard impacte visuellement. En 2018, l'étude Deloitte dévoilait que 90% des spectateurs souhaitaient revenir dans la région. Et un quart de ces spectateurs venaient pour la première fois.

Une Summer Race stratégique

Et cette « Summer Race » - nom déposé - joue aussi sur sa propre attractivité. « Nous l'appelons ainsi car nous voulons être considéré comme la première course de l'été », explique le directeur général qui veut redonner de l'impulsion à un rendez-vous qui a mis dix ans à revenir dans le Sud et qui n'a pu profiter que de deux Grands Prix avant l'arrêt aux stands imposé par la pandémie.

Ancien directeur d'écuries - Renault, Lotus et McLaren - Eric Boullier apporte sa connaissance et son point de vue au Grand Prix de France. Son leadership aussi et « un management un peu différent », reconnaît-il. « Dans le monde de la F1, il est essentiel de savoir coopérer et de centraliser les informations. De ne surtout pas fonctionner en silo ». L'image de la Formule 1, « souvent sur les réseaux sociaux » a « su toucher une population qui n'était pas connectée. La série documentaire de Netflix (qui raconte l'univers des paddocks NDLR) a créé un intérêt » auprès des plus jeunes. De quoi booster la notoriété et... les retombées économiques, au Castellet ou ailleurs.

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