A Tende, dans la vallée sinistrée de la Roya, la vie continue de s'étirer au gré des convois. Plus de sept mois ont passé depuis Alex et l'activité, faute d'accès, reste réduite à peau de chagrin. Et quand celle-ci peut se faire, cahin-caha, c'est souvent au prix fort. Les contraintes s'alimentant d'elles-mêmes, fragilisant un peu plus des entreprises déjà éprouvées. Et ce, sur une période appelée à durer plusieurs années. Alors, "comment tenir le choc en attendant le retour à des conditions d'activité normales ?", s'interroge la dirigeante de l'entreprise de maçonnerie générale Guido, Sophie Cottalorda. Qui plus est lorsque les pertes d'exploitation, parce que indirectes, ne sont pas prises en charge par les assurances ?
Une aide spécificité tempête ?
La première réponse est évidemment sonnante et trébuchante. Comme à chaque coup dur, la CCI Nice Côte d'Azur se met en ordre de marche pour qu'à la catastrophe naturelle ne succède pas le désastre économique. Parmi les réponses apportées, la création d'un nouveau fonds exceptionnel de solidarité, le troisième en un an après ceux liés aux inondations d'octobre 2019 et à la Covid. Soit, pour l'épisode Alex, 6,7 millions d'euros débloqués par la Région Sud, le Département des Alpes-Maritimes, la Métropole Nice Côte d'Azur, la Communauté d'Agglomération de la Riviera Françaises (Carf) et les réseaux consulaires, chargés de les répartir. L'objectif "est de venir en complément des assurances pour répondre au besoin de trésorerie immédiate, pallier les pertes d'exploitation et les dommages matériels", explique Jean-Pierre Savarino, président de la CCI azuréenne, toutefois bien conscient que celles-ci ne peuvent suffirent. Parce que ponctuelles.
"Ces aides ont été les bienvenues, elles nous ont permis de passer l'hiver même si elles ne correspondent que de loin à l'activité d'un mois de décembre, indique Luc Fiorini. Depuis, "rien" en dehors de celles attachées à la situation sanitaire, les deux magasins Stella Alpina étant fermés. Une situation vécue comme "une double peine" pour le commerçant que l'absence de dispositif pérenne inquiète, lui comme tous les autres. "C'est une problématique qui nous préoccupe, reconnaît Jean-Pierre Savarino. Que se passera-t-il une fois la pandémie derrière nous et l'arrêt des aides qui y sont associées ? Il faut que l'Etat pense à une spécificité tempête qui accompagne ces entreprises le temps nécessaire à leur redémarrage".
« La réponse de Bercy n'est pas satisfaisante »
L'Etat, justement. Alexandra Valetta-Ardisson, députée de la quatrième circonscription des Alpes-Maritimes, s'efforce de l'alerter sur les difficultés vécues par les habitants et entrepreneurs de la vallée depuis des mois. Une première initiative, en date du 1er décembre 2020, sous la forme d'une question orale sans débat adressée à Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l'Economie, en charge des PME, abordait déjà la solution d'un passage en zone franche ou en zone de revitalisation rurale à titre dérogatoire. Le 18 janvier, un courrier écrit en commun avec le président de la Carf et les cinq maires de la vallée de la Roya, reprenait l'argument, suivi le 19 janvier, par une question écrite au ministère. "Nous avons besoin d'outils plus pérennes comme le passage en zone franche pour passer le cap tant que les accès ne seront pas rétablis, plaident de concert Sophie Cottalorda et Luc Fiorini. Ils nous permettraient d'absorber les coûts et les contraintes que l'on supporte aujourd'hui et de redynamiser la vallée en devenant plus attractifs".
Soutenue par les élus et professionnels des trois vallées touchées, cette solution qu'ils considèrent comme idoine ne trouve pas l'écho espéré au sein de l'administration. "Bercy n'en veut pas. Il y a un truc qui les gêne mais je n'arrive pas à savoir quoi, nous n'avons eu droit à aucune argumentation et à encore moins de propositions alternatives", avance Alexandra Valetta-Ardisson. Qui poursuit : "Plus de sept mois après Alex, la réponse de Bercy n'est pas satisfaisante. Cette tempête est considérée comme la plus grosse catastrophe en termes de destruction d'infrastructures en France métropolitaine depuis la seconde guerre mondiale. Je peux tout à fait comprendre l'absence de dispositif fiscal et social existant adapté, les outils que l'on pousse ne concernent généralement que les entreprises nouvellement installées alors que c'est le microcosme actuel qu'il convient d'abord d'aider. Mais rien n'empêche d'être proactif et innovant, et de créer autre chose en mettant en place un process hybride". Et la députée de conclure : "Les dotations et fonds de reconstruction ne peuvent être l'unique réponse. Avec le préfet Pelletier (en charge de la reconstruction des vallées, NDLR), nous restons sur le pont. Nous continuerons à nous battre." A Tende aussi, le combat se poursuit. Des actions médiatiques sont désormais envisagées, sous la houlette du Comité de Soutien des Voies de Communication de la Vallée de la Roya, "pour nous rendre plus visibles et avoir enfin des résultats".
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