A Nice, les fournisseurs du CHR créent un consortium de défense (avec des idées pour la relance)

Regroupés sous le principe que l’union fait la force, les fournisseurs des cafés et restaurateurs des Alpes-Maritimes sont, comme leurs clients, privés d’activité et de chiffre d’affaires. Mais aussi de soutien financier. Une situation qui tend la pérennité de ces TPE PME, qui ne manquent pas d’idées pour consolider leur business modèle.
(Crédits : DR)

Elles sont quatorze - grossistes en boisson, brasseurs, agents en vin - et elles ont décidé de laisser de côté l'aspect concurrentiel du business pour rassembler leur colère et leur incompréhension en un mouvement qui ne se veut pas seulement revendicatif mais aussi productif.

Revendicatif car lorsque les restaurateurs et les cafetiers sont dépourvus d'activité, les fournisseurs en boissons pour les professionnels aussi. Sauf que cela est moins su, moins médiatisé et que, comme lors du premier confinement en mai dernier, la filière n'a pas d'autres solutions immédiates que de prendre son bâton de pèlerin pour se faire entendre.

Être couteau suisse

Plutôt que de faire résistance chacun de son côté, ces TPE PME ont choisi de faire front commun. D'où l'idée de se réunir sous un consortium capable de se faire entendre. Car, comme ce fut le cas en mai dernier, c'est auprès des parlementaires et des municipalités que ces patrons d'entreprises, familiales ou récentes veulent obtenir un premier gain de cause : une aide financière capable de les aider à passer le cap.

Alors que les restaurants et les cafés peuvent bénéficier de mesures d'aide, il n'en n'est rien pour les fournisseurs de ces professionnels. « Lors du premier confinement, nous avions déjà été oubliés. Le travail de la Fédération nationale des boissons nous a permis d'être intégrés au plan tourisme », raconte Louis Bonifassi qui dirige, avec son frère, la Maison Bonifassi, entreprise familiale basée à Nice, grossiste en boissons. Deuxième confinement et nouvel oubli dans les mesures gouvernementales. Lourd de conséquences car la saison estivale, privée de clientèle internationale n'a pas vraiment permis à la filière de connaître une activité suffisamment forte pour envisager une reprise sereine. « Le tourisme international n'a pas été possible cet été et nous n'avons pas bénéficié de la clientèle franco-française », analyse Louis Bonifassi. Seul levier possible, le chômage partiel qui a été activé, même durant la période estivale afin de limiter les dégâts. « Nous avons été obligés d'être le couteau suissegérant, notamment pendant le confinement, les tâches administratives, les appels téléphoniques, les quelques livraisons qui nous restaient ».

Du tout de suite mais pas que...

Ce qui aiderait bien la filière c'est le maintien de l'activité partielle avec prise en charge à 100 % et cela pour la durée de l'année 2021 tout comme l'exonération totale des charges sociales tant que les entreprises n'auront pas retrouvé un niveau d'activité de l'ordre de 80 % de leur activité en 2019. De quoi laisse venir la reprise, la vraie.

Et on en vient aussi au PGE, que les entreprises de la filière n'ont pas hésité à solliciter (et à obtenir) mais qu'il va falloir rembourser. Une cause d'inquiétude, que le consortium voudrait apaiser en sollicitant la prolongation des échéances du Prêt garanti par l'Etat sur 10 ans, mais en donnant priorité au remboursement des dettes antérieures.

Si un soutien immédiat est nécessaire, le consortium n'est pas uniquement dans une posture revendicative. Il a aussi des idées, des suggestions capables d'aider la filière à retrouver vite de quoi sortir la tête de l'eau. Comme le renfort des aides pour embaucher davantage d'apprentis et d'alternants - sujet très à la mode - via une prise à 100 % des coûts pédagogiques. Une enveloppe dédiée au CHR et les activités qui en dépendent dans le plan de relance serait aussi bienvenu.

Anti-gaspi

Et puis il faudrait aussi que les pouvoirs publics apportent un soutien qui ne coûte pas grand-chose à l'Etat mais qui pourrait tout changer pour les fournisseurs du CHR : mettre en place des mesures d'obligation et de communication sur la commercialisation de produits touchés par DDM, la date de durabilité minimale. Une DDM qui oblige les professionnels à détruire leurs stocks, ces produits étant difficilement « vendables ». Alors que pouvant être encore consommés. « Il faudrait une campagne pour dire que ces produits doivent rester dans le circuit de consommation », estime Louis Bonifassi. « Au premier confinement nous avons eu des attestations de prorogation. Sans communication des pouvoirs publics on ne s'en sortira pas ».

Crédit d'impôt pour aider à la digitalisation

Où en revient aussi à la question de la digitalisation. Le consortium niçois verrait d'un très bon œil l'obtention d'un crédit d'impôt digitalisation. Car comme dans d'autres secteurs, la crise a accentué le besoin du numérique comme outil de compétitivité et de diversification d'activité. La digitalisation n'est pas forcément culturelle pour un secteur où le rapport humain régit les relations professionnelles. « La filière CHR est très habitée par l'humain », reconnaît Louis Bonifassi, qui dans sa propre entreprise a déjà franchi le pas en créant une application de pré-commande. Mais il reste encore de la pédagogie à faire. Surtout que le digital peut être le moyen pour ces fournisseurs de professionnels de s'ouvrir à d'autres segments de clientèle comme les particuliers. « Il faudra rebondir et l'ouverture à d'autres clientèles sont des solutions auxquelles on réfléchit ».

A quatorze, le consortium représente 300 salariés et un chiffre d'affaires de 100 M€. Il entend aussi s'ouvrir à d'autres fournisseurs de CHR, pas uniquement ceux de la boisson, toute activité et taille confondues. L'initiative azuréenne rejoint celles déjà lancées en Bretagne, dans les Hauts-de-France, dans le Grand Est, en Auvergne Rhône Alpes ou encore en Nouvelle Aquitaine. Un peu comme les stations de ski, c'est une filière qui est en train de se constituer et de se fédérer. C'est aussi une filière secouée qui voir sa pérennité engagée.

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Commentaire 1
à écrit le 07/12/2020 à 15:26
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J'ai discuté avec de nombreux éleveurs de canards, des petits producteurs, qui ont du arrêter leur activité après la crise de la grippe aviaire qui a fait ordonner le massacre de millions de bêtes dont les reproducteurs faisant fermer des centaines d...

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