L’enjeu de la liaison maritime entre Marseille et Tanger

La Méridionale va lancer d'ici novembre une ligne Ropax, roulier et passager, entre Marseille et Tanger avec comme objectif une rentabilité dès 2021. Le port et les élus locaux militent depuis longtemps pour la création d'une telle liaison. Mais la concurrence du tout route reste féroce.
(Crédits : Camille Moirenc)

C'est un vieux serpent de mer. La liaison de marchandise en roulier entre le port de Marseille et celui de Tanger revient sur le devant de la scène. Cette fois, c'est La Méridionale qui endosse dans le premier rôle. Stanislas Lemor, président-directeur général de Stef, qui détient la compagnie maritime, a annoncé début septembre le lancement d'une ligne Ropax (roulier et passager) entre la France et le Maroc d'ici novembre. Un choix censé compenser les difficultés sur le marché corse de La Méridionale.

La liaison aura "une fréquence de trois rotations par semaine" pour atteindre la rentabilité dès 2021, précise le dirigeant, dans des propos que rapporte L'Antenne. Contacté, La Méridionale n'a pas souhaité en dire plus et promet des annonces rapidement. Pour l'instant, la compagnie se contente de relayer sur les réseaux sociaux l'arrivée à Marseille des navires qui assureront la liaison.

Un pari

"La Méridionale est un pro du roulier et l'offre propose une bonne fréquence", estime Paul Tourret, directeur de l'Institut Supérieur d'Économie Maritime (ISEMAR). Sur le terrain de la marchandise, le concurrent direct est la route. Depuis le Tanger, textiles, produits manufacturés et fruits et légumes rejoignent l'Europe par le très proche port espagnol d'Algésiras avant d'embarquer sur des camions vers tout le Vieux Continent.

"Il faut maintenant que l'offre maritime soit adaptée au niveau des prix, avec la Covid-19 les tarifs des soutes devraient être plutôt bas", prévient Paul Tourret. Transporter une marchandise via un camion coûte environ entre à 0,80 et un euro. "La question est de savoir si le marché a besoin d'une telle liaison. Une traversée maritime pour envoyer une remorque via la mer à Avignon demande beaucoup de compétitivité face à la route, cela se joue peut-être à quelques euros", prévient le directeur de l'ISEMAR. Pour autant, Paul Tourret estime "qu'il est temps de tester cette liaison" et juge que "c'est un pari, mais comme pour toutes les lignes qui se lancent". Concernant le passager, il existe actuellement une traversée qui va au port de Sète dans l'Hérault ou de Gênes en Italie. L'idée est donc de capter ce marché.

CMA CGM retente sa chance

Des ambitions qui devraient ravir les acteurs économiques locaux. Le port, soutenu par les élus, tente depuis longtemps de nouer des liens avec le Maroc. En 2014, une délégation avait été reçue pour signer des accords avec l'agence nationale des ports et l'agence spéciale Tanger Med. Des documents qui n'étaient finalement que des études. En avril 2019, une délégation politique marseillaise a traversé la Méditerranée pour de nouveau faire un appel de pied aux décideurs marocains.

Entretemps, CMA CGM avait tenté l'aventure. Fin 2017, le géant du conteneur avait lancé sa ligne dédiée au fret sur la base d'un rythme hebdomadaire avant de l'arrêter au bois de trois mois faute de client. Les transporteurs avaient alors été accusés de ne pas avoir joué le jeu du report modal, qui présenterait un bénéfice écologique. Mais l'offre alors proposée par l'armateur était aussi jugée insuffisante en termes de fréquence pour concurrencer la route. Toutefois, CMA CGM n'a pas abandonné l'idée puisque des négociations sont en cours avec La Méridionale pour s'associer à cette nouvelle offre.

Le port prévoit un espace dédié

Le port accompagne la démarche puisqu'il a lancé un appel d'offres, clôturé le 15 septembre, pour "choisir un opérateur avec lequel sera conclu un contrat de mise à disposition en 2 phases d'un terre-plein d'une superficie finale de 13810 mètres carrés dans le secteur du H19 (Bassins Est du Gpmm) destiné à la constitution d'un espace Roro affecté principalement à la manutention et au stockage d'unités roulantes à destination du Maroc et complémentairement vers d'autres zones hors Schengen".

En clair il s'agit d'aménager pour la future liaison un espace qui se trouve à côté... du cap Janet, dont le futur terminal prévu pour 2022 est destiné à l'accueil des passagers en provenance et à destination du Maghreb. "C'est la vocation des bassins Est d'être une zone de réception, fret et ferry, du Maghreb", juge Paul Tourret. Il reste donc à concrétiser l'essai.

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