Lfoundry Rousset : Fin tragique

Le tribunal de commerce de Paris a choisi l'offre de reprise d'un courtier brésilien qui devrait démanteler l'usine de puces electroniques dans les deux ans. Invraisemblable pour les anciens salariés qui s'interrogent sur les réelles motivations des représentants syndicaux. Les soutiens au projet Général Vision se sont donné rendez-vous devant le site LFoundry à Rousset ce mardi 17 juin à 14h et jeudi 20 juin à 11h devant la Préfecture.


Fin mai, c'était une première stupeur dans l'environnement du tribunal administratif de Paris à l'occasion de l'ouverture des plis contenant les offres de reprise des actifs de LFoundry Rousset (13), l'entreprise de micro électronique placée en liquidation judiciaire en décembre dernier et entraînant le licenciement de 613 salariés. Sur les 12 propositions, seule l'offre de la société franco-américaine General Vision envisageait la poursuite d'une activité industrielle sur le site moyennant une offre à 9,5 M€ pour redémarrer l'activité industrielle de fabrication de semi-conducteurs avec l'embauche de 240 salariés sur deux ans. Les autres étaient surtout intéressés par le démantèlement et la revente des brevets et des machines de l'usine. Et tandis qu'une partie des anciens salariés (licenciés voire ayant retrouvé un travail pour certains mais impliqués pour qu'une activité perdure) soutenaient l'offre General Vision, les anciens délégués du personnel se sont ralliés ce jour là à la proposition du broker brésilien. Selon le syndicaliste Jean-Yves Guerrini, cité par l'AFP, son offre comprenait aussi la mise en place d'un laboratoire d'excellence pour développer les technologies propriétaires LFoundry dites LF110 et LF150 au Brésil. Soit une visibilité de deux ans, "le temps de démanteler l'usine."

Qui va supporter le coût de dépollution ?

La semaine dernière, le tribunal administratif a tranché et a retenu in fine l'offre du broker brésilien et de ses 18 M€, qui devrait donc démanteler l'usine classée Seveso dans les deux ans et dont le coût est estimé à 24 M€ (dépollution incluse). Qui va payer dans la mesure où Atmel n'est pas le dernier propriétaire et que LFoundry Rousset n'est pas solvable ? A priori pas le Brésilien. Le liquidateur a porté plainte contre l'ancien propriétaire Atmel pour se couvrir face à ces coûts de dépollution. Quoi qu'il en soit, c'est la fin d'un long parcours pour cette entreprise que son ancien propriétaire, l'Américain Atmel, a vendu en 2010 au groupe allemand LFoundry. Atmel fait d'ailleurs l'objet de deux assignations en justice, dont l'une pour responsabilité dans la faillite de l'entreprise des Bouches-du-Rhône. Il est notamment reproché à l'Américain d'avoir sciemment revendu en 2010 l'usine au groupe allemand LFoundry, alors déjà en difficulté mais présenté comme un investisseur sérieux et viable, afin qu'il ferme l'entreprise à moindre coût. Une action collective (class action) a d'ailleurs été engagée par l'association de la CFDT avec Me Fiodor Rilov (l'avocat médiatisé pour son implication dans les dossiers comme Continental ou Goodyear) et mandaté par une majorité des salariés, devant une juridiction new-yorkaise pour faire annuler la cession de 2010 et surtout démontrer la responsabilité d'Atmel à l'égard des salariés. Une procédure dont les réelles motivations sont également questionnées.

Mauvaise gestion de LFoundry selon Atmel

Dans un entretien à l'Usine Nouvelle paru en novembre dernier, Alfredo Vadillo, le directeur général en France d'Atmel, réfutait en bloc toute responsabilité, accusant la direction de LFoundry de mauvaise gestion. "Le processus de vente a été rigoureusement étudié, structuré, évalué et approuvé par toutes les parties prenantes, y compris par le Comité d'entreprise et par le président actuel de LFoundry. L'opération offrait à LFoundry toutes les chances possibles de réussir — un repreneur rentable et expérimenté, un plan opérationnel solide, une source de revenus garantie à long terme, aucune dette, et des actifs nets d'une valeur supérieure à 80 M€. LFoundry a fait preuve de mauvaise gestion et c'est pour cette raison qu'ils sont en faillite. Tenir Atmel pour responsable est inacceptable, et nuit aux activités industrielles dans la région."

Incompréhension totale des salariés face à l'attitude des représentants de la CFDT

Du côté des anciens salariés, cette décision est invraisemblable et l'incompréhension est totale quant aux intentions des représentants syndicaux. "En plus d'un pillage d'équipements, nous assistons à un vrai pillage intellectuel de technologies développées en collaboration avec des équipes du CEA Leti. La communauté du Pays d'Aix a voté 4,5 M€ en janvier 2014 pour maintenir l'unité de fabrication en sommeil afin de rester opérationnelle dans la perspective d'une reprise. Cette usine a été en outre financée à sa création par l'Europe et le gouvernement Français...", explique Valérie Zoppi, une ancienne salariée, qui avec d'autres, a la conviction que "les représentants CFDT, déboutés sur leur projet de SCOP, se sont lancés dans une politique de la terre brûlée et que leur seul objectif est d'obtenir plus d'argent pour les salariés." Sachant pourtant que 42 M€ ont déjà été débloqués et versés aux 550 salariés par l'Assurance garantie de salaire (AGS) pour couvrir l'ensemble des indemnités légales et supralégales. Toutes les personnes qui ont soutenu le projet General Vision se sont donné rendez-vous devant le site LFoundry à Rousset ce mardi 17 juin à 14h et jeudi 20 juin à 11h devant la Préfecture.

A.D

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©Terzian (archives)



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