Capital-investissement : Alerte rouge

En déplacement à Marseille pour rencontrer les professionnels du capital-investissement de la région, Louis Godron, président depuis juin dernier de l?Association Française des Investisseurs pour la Croissance (AFIC), a délivré quelques données sur l?activité régionale en 2011 et tire la sonnette d?alarme.


Epuisement des réserves de capital à investir, raréfaction des nouvelles ressources, chute brutale des fonds collectés auprès des investisseurs ... force pour l'AFIC de constater que la conjoncture n'est pas très favorable aux professionnels du capital investissement.

Au cours du 1er semestre, les levées de fonds et les montants des investissements "sont entrés brutalement dans le rouge. Dans un marché de levées de fonds devenu extrêmement difficile, les ressources financières disponibles fondent année après année", résume Louis Godron, président de l'AFIC et associé au sein de la société de gestion, Argos Soditic.

Selon, l'AFIC, le différentiel se creuse d'année en année entre investissements et levées de fonds : il était de 1,9 Mds€ en 2010, 5,2 Mds en 2011 et déjà de 5, 7 Mds au premier semestre 2012. Au cours de cette période, les capitaux levés se sont élevés à 1,794 Md€, soit seulement 28% du montant total collecté sur l'ensemble de l'année 2011 (6,456 Mds€).

Autre alerte, les montants investis dans les entreprises ont reculé de 42,5% entre les premiers semestres 2011/2012 (2,2 Mds€). Cette érosion affecte tous les segments, de l'amorçage à la transmission. Mais la plus inquiétante demeure celle qui touche le capital développement, qui présentait jusqu'à présent la meilleure résilience face à la crise.

Les banques et compagnies d'assurance, historiquement les plus importantes contributrices, sont passées de 40% de la collecte en 2008 à 29% en 2011. Ce semestre, les banques totalisaient 13,5% des fonds collectés et les assurances, 6,9%. Quant aux investisseurs étrangers, ils représentaient 52% des apports en 2011 et plus que 27% sur ce 1er semestre.

En 2011, PACA était la 3ème région en termes de montants investis avec 353 M€ (contre 157 M€ en 2010) et la 4ème en nombre d'entreprises (74). Elle n'avait pas connu un tel niveau depuis 2007 (389 M€). "C'est une très bonne année sur un plan régional, commente Louis Godron. La région tient son rang en terme de volume, se caractérise par une présence forte du capital innovation ce qui est typique, car ce segment se concentre en France sur quelques rares régions, comme Île-de-France et Rhône-Alpes. Elle traduit le dynamisme de Sophia Antipolis et du pôle universitaire Aix Marseille. Et elle démontre également tous les rouages d'un fonctionnement du capital investissement vertueux".

Le président s'appuie à cet égard sur les indicateurs sociaux et économiques qui sont désormais intégrées dans leur étude annuelle. "Entre 2009 et 2010, les entreprises régionales accompagnées par le secteur ont vu leur chiffre d'affaires croître de 7,3% sachant que la moyenne des PME françaises est inférieure à 3% et leurs effectifs de 3,7%, très largement supérieure à la moyenne de l'industrie française puisque l'emploi marchand a progressé de 0,8%".

Si Paca paraît pourtant loin des indicateurs de la région voisine - en Rhône-Alpes, 658 M€ ont été investis par les sociétés de gestion dans 150 entreprises - Louis Godron rappelle qu'il "faut prendre garde à des effets de distorsion : quelques grosses opérations peuvent déséquilibrer l'ensemble. L'indicateur clé est le nombre d'entreprises accompagnées. Par exemple, prenons une région comme Midi Pyrénées (198 M€ et 81 entreprises, ndlr) où l'on a aussi un beau tissu PME, avec de l'innovation et de la technologie. On voit qu'ici, l'on est mieux armé et plus efficace puisqu'il y a eu autant d'entreprises soutenues et plus de capitaux déployés".

Mais l'autre particularité régionale est ailleurs : "dans le poids et la densité du capital développement, passé de 97 M€ en 2010 à 166 M€ en 2011 pour 40 entreprises. Le capital développement correspond à des investisseurs minoritaires, qui ne cherchent donc pas à prendre le capital mais à accompagner l'accélération de l'entreprise", commente-t-il. A contrario, les montants investis dans la transmission sont relativement faibles en Paca.


L'organisme représentant les intérêts de la profession demande la pérennisation du statut des FIP et des FCPI et l'orientation de l'épargne collectée par le Livret A et le Livret de Développement Industriel Durable vers le capital investissement. "Seulement 5% de cette collecte, étalés sur 3 ans alloués vers le capital des PME, permettraient de combler une partie des manques actuels, sans changer les équilibres financiers pour l'État", souligne Louis Godron.


A.D

Photo : Louis Godron, président de l'AFIC depuis juin dernier

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