Sodexo investit le terrain du sport et des loisirs

Parc des Princes, Cité de la Musique à l'Île Seguin, Lido... Le géant français des services aux entreprises redessine depuis plusieurs mois son image en développant ses activités dédiées au luxe et au sport. Une stratégie intégrée dans une refonte totale de son organisation mondiale.

J-2 avant la finale masculine de Roland Garros, J-6 avant le coup d'envoi de la Coupe du Monde de football au Brésil... la saison sportive bat son plein. Et les spécialistes de la restauration collective se frottent les mains. En particulier le géant Sodexo, qui - cette partie de son activité n'est pas la plus connue - gère toute la restauration et les "services sur site" (accueil, billetterie etc.) du célèbre tournoi français. Justement, le numéro deux mondial de la restauration collective derrière le britannique Compass tenterait bien le grand chelem sur le terrain du sport et des loisirs. "C'est devenu une activité stratégique pour le groupe", affirme Nathalie Bellon-Szabo, l'une des héritières du fondateur Pierre Bellon, qui dirige les filiales "prestige, sports et loisir" de Sodexo en France depuis 18 ans. L'an dernier, ses équipes (3 000 personnes) ont réalisé 350 M€ de chiffre d'affaires. Presque une goutte d'eau si on compare ce résultat aux 18 Md€ réalisés par la multinationale. Une goutte d'eau certes, mais qui sert de vitrine. "C'est de l'image et du savoir-faire", vantait ainsi Michel Lander, le P-d.g. de Sodexo, lors d'une interview accordée à l'agence Reuters le 3 juin. D'ailleurs, d'une image redorée, Sodexo en a bien besoin,surtout dans certains pays comme aux États-Unis où elle a dû verser 80 M USD d'indemnités à des employés jugés victimes de racisme de la part de cadres de l'entreprise.


JO de Londres

De fait, depuis plusieurs mois, les contrats s'amoncèlent. Déjà, en 2012, le champion français avait décroché la timbale en obtenant toute l'intendance des JO de Londres. Contrecoup : sur son exercice 2012-2013 clos en août de l'année dernière, le chiffre d'affaires consolidé des activités sports et loisir dans le monde a dégringolé de 22,5 %, tandis que les autres filiales s'en sortaient bien mieux. Ce qui, compte tenu de son faible poids relatif par rapport à la restauration en entreprise par exemple, s'est révélé moins pénalisant que d'autres facteurs comme la crise en Europe (le groupe a alors enregistré un résultat opérationnel en baisse de 16,4% à 439 M€).


Le cordon bleu de l'Équipe de France

Cette année, au Brésil, la Coupe du Monde de football lui a échappé, et ce, malgré sa place de leader dans les services sur site avec l'acquisition de Puras do Brasil. Pourtant, le groupe français sera bien aux première loges... avec le cordon bleu des joueurs, Yannick Coquisart, un chef estampillé Sodexo qui officie habituellement à Clairefontaine et connaitrait donc mieux que quiconque le fin palais des stars du ballon rond. Dans le football toujours, tous les repas du Parc des Princes, que ce soit dans les loges ou les buvettes, sont désormais servis par le groupe familial français. Un contrat ravi au concurrent Elior et qu'un autre rival, Potel et Chabot, convoitait également. De même, c'est encore l'entreprise française qui sert les repas aux supporteurs de luxe des loges de l'Olympique lyonnais (OL) et de l'Olympique de Marseille (OM). Le Vélodrome accueillera d'ailleurs deux fois plus de spectateurs VIP, les loges passant de 3 000 à 6 000 places. En outre, toutes les prestations de traiteur des précédentes coupes du monde de Rugby ont aussi été confiées à Sodexo. "Tout d'un coup, on a fait un chiffre extraordinaire, 120 M€ de chiffre d'affaires", sourit Nathalie Bello-Szabo. L'astuce consiste en outre à amortir les investissements en exploitant les lieux en dehors de ces événements sportifs. C'est le cas par exemple avec le musée de Roland Garros mais aussi avec d'autres espaces du parc utilisés pour des séminaires.

Activité cabaret

A côté de ces activités sportives (qui comprennent aussi le Tour de France et la très chic course d'Ascot outre-Manche), Sodexo est également propriétaire d'une flotte de bateaux sur la Seine, du Lido, de Lenôtre.... Le cabaret, acquis en 2006, près de dix ans après le début d'un contrat dans la restauration, est en plein développement. Un nouveau directeur artistique, Franco Dragone, ancien compère de Guy Laliberté au Cirque du Soleil et concepteur du show de Céline Dion à Las Vegas, a été recruté pour concocter une nouvelle revue censée dépoussiérer l'image du lieu tout en conservant son esprit. Date de livraison prévue : printemps 2015. Le célèbre cabaret parisien exporte en outre ses spectacles dans les pays émergents avec des productions à Moscou, Saint-Pétersbourg ou... Dubaï (où les danseuses étaient, sans surprise, priées de cacher les détails de leur anatomie).


Pas intéressé par Hédiard

Le groupe compte également développer le traiteur Lenôtre, acheté en 2011 à Accor, notamment avec des ouvertures en Asie et en Amérique. Mais pas en achetant Hédiard, l'épicerie de luxe en redressement judiciaire plutôt promise à d'autres destinées. Par ailleurs, côté culture, la maison sera bientôt productrice de spectacles à la Cité de la Musique de l'île Seguin (Boulogne-Billancourt) sur l'ancien terrain des usines Renault via un partenariat public-privé. Pour remplir les deux salles de 4 000 et 800 places, la très dynamique dirigeante de la filiale française est allée chercher un partenaire de taille et ancien rival pour le rachat du Lido : TF1. La première pierre de l'édifice conçu par l'architecte japonais Shigeru Ban doit être posée le 5 juillet.


Recomposition globale

De nouvelle architecture, il est enfin question dans toute l'organisation mondiale de Sodexo. Celle-ci est en passe de connaître une révolution. Pour l'instant, les activités du champion français sont divisées en zones géographiques. Un grand plan de restructuration lancé en 2012 et qui doit aboutir en 2020 prévoit un grand chambardement. A partir de septembre 2015, elles seront divisées en sept entités, dont un regroupant "sport loisirs et justice", avec à leur tête un directeur ou une directrice, selon une répartition paritaire. Chacun d'entre eux prendra les rennes de l'ensemble des filiales de ce "segment" dans le monde. Une logique propre à un nombre croissant d'entreprises multinationales qui a le mérite de "donner un nouveau souffle à l'entreprise, d'aller plus vite dans des pays où l'on n'est pas encore", espère Nathalie Bellon-Szabo. En tous cas, le terrain est préparé avant l'Euro 2016 qu'accueillera la France.

Marina Torre

Latribune.fr

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