Débat CCIMP : Le foncier, entrave au développement des entreprises

Défi foncier et compétitivité des entreprises. C?était le thème du deuxième rendez-vous des Ateliers de la Métropole initié par la CCIMP* et dont la finalité est de porter le débat sur des thèmes propres à l?aménagement du territoire à l?échelle de la métropole.

Défi foncier et compétitivité des entreprises. C'était le thème du deuxième rendez-vous des Ateliers de la Métropole le jeudi 17 octobre initié par la CCIMP* et dont la finalité est de porter le débat sur des thèmes propres à l'aménagement du territoire à l'échelle de la métropole.


Trois témoignages : celui de Paul Morgavi, dirigeant d'Impika, d'Olivier Bourgois, fondateur de Stéripure et de Michael Leplatois, P-d.g de Keolabs, entreprise née en 2012 de la fusion de Soliatis (Salon-de-Provence) et de Raisonance (Montbonnot). Trois parcours d'entreprises différents mais une problématique commune : un développement bloqué par la difficulté de trouver du foncier. Pour Keolabs, une entreprise spécialisée dans les tests et certification de cartes à puce, il a fallu un an pour trouver un site, une bataille juridique et une surenchère pour emporter l'affaire. Pour Olivier Bourgois, qui est en train de passer à la phase industrielle de son procédé de débactérisation de matières premières alimentaires, "il a été très très compliqué de trouver 5 à 10 000 m2 dans un délai court. Tout est extrêmement cher et j'ai vu beaucoup de bâtiments vétustes". "Dans le monde dans lequel nous vivons, tout va extrêmement vite. Il y a un problème de réactivité. La mise à disposition de surfaces et de volumes ne sont pas compatibles avec la vitesse de propagation de l'entreprise", explique pour sa part Paul Morgavi, d'Impika, qui depuis son rachat par Xeros, est devenu le centre de recherche mondial de l'américain pour la partie imprimantes à jet d'encre.

L'économie productive représente 34 % de l'emploi dans le département
Pour autant chaque année, selon le Service d'observation et d'études statistiques du Ministère de l'écologie et du développement durable, la France consommerait 75 000 ha (pour rappel, 1 ha égale environ 1 terrain de foot) pour son développement économique. Le nombre de ZAE oscillerait entre 24 000 et 32 000, soit 450 000 hectares. Rien que dans Les Bouches-du-Rhône affichent au compteur 290 zones d'activités réparties sur 26 000 hectares pour 26 000 entreprises représentant 270 000 emplois. "La part de l'économie productive pèse 34 % des emplois dans le département. Il est important de la préserver", insiste Louis Allocio, vice-président de la CCIMP en introduction. Rude défi donc de rendre compatible le développement économique avec une consommation foncière raisonnée.


Reconfigurer l'existant
Pourquoi avec quasiment une ZAE par commune en France, ne parvient-on pas à répondre à la demande du foncier économique ? Pour comprendre les choses, il faut revisiter 50 ans de politiques publiques en matière d'aménagement du territoire. Et se souvenir que les ZAE avaient pour principal objectif de "sortir" des villes les activités industrielles qui généraient des nuisances et des risques pour les populations. En mordant sur le foncier agricole, on pouvait répondre à la demande des industriels pour des emprises foncières importantes, abordables, offrant des capacités d'extension. La situation se prêtait d'autant mieux à ces politiques volontaristes que le foncier rural s'achetait à bas prix et que la forte inflation rendait son portage indolore pour la collectivité. La mode est donc au zoning. Et la multiplication des zones d'activité est ainsi devenue une marque paysagère de la France. Or voilà, l'économie va muter, les usages évoluer, les entreprises aller et venir...Et faute d'entretien, les ZAE vont se dégrader. Et plutôt que de reconfigurer l'existant, dans un contexte de concurrence entre territoires, les collectivités vont privilégier la création d'une offre nouvelle. La consommation foncière occasionnée par cette logique des grands ensembles est à l'origine des maux dont souffrent aujourd'hui la plupart des grandes villes et de leurs périphéries : étalement urbain, saturation des axes routiers, augmentation de la mobilité pendulaire..."Nombre de ZAE offrent aujourd'hui une faible qualité pour les entreprises : dégradation des espaces et des équipements publics, déqualification du tissu économique, faible niveau de services aux entreprises et aux salariés, conflits d'usage et d'image...Pour enrayer cette situation, les collectivités publiques ont tendance à y apporter des réponses ponctuelles et cloisonnées", explique Jean-François Vallés, directeur associé de Synopter, un cabinet de conseil en gestion durable des zones d'activités et parcs industriels. Le consultant prône "une révolution culturelle". L'entreprise doit "repenser sa relation au foncier et les collectivités, passer d'une logique de planification à une logique de gestion de sites".


Grand Lyon : Un schéma de développement économique à l'échelle de 58 communes

Elaboration d'un schéma d'accueil des entreprises et de gestion de ses ZAE, c'est la démarche entreprise par le Grand Lyon à l'échelle intercommunale de 58 communes (toutes les ZAE de l'intercommunalité sont d'intérêt communautaire et gérées par le Grand Lyon). Une démarche, explique Adeline Rambaud, en charge de la gestion des sites économiques pour le Grand Lyon, "qui permet d'identifier et d'organiser l'ensemble des moyens à mettre en oeuvre pour répondre à la fois à nos objectifs de développement du territoire (anticipation par la constitution de réserves foncières sur les secteurs) mais aussi pour maintenir les entreprises sur le territoire en leur proposant une offre diversifiée en termes de prix et de localisation géographique." Une stratégie qui devrait être élargie aux 4 intercommunalités de la future métropole en 2015.



Trouver du foncier exploitable
Quoi qu'il en soit, pour la communauté urbaine Marseille Provence Métropole, la problématique du foncier sur un territoire, qui cumule des contraintes topographiques et réglementaires, n'est pas simple. Mais le développement économique est une priorité, affiche clairement Olivier Latil d'Albertas, directeur du pôle économie et attractivité du territoire à la communauté urbaine MPM. "Dès qu'on repère du foncier exploitable, on le mobilise en assumant les risques commerciaux". Au Nord-Ouest, 300 hectares sont mobilisés sur les communes de Marignane, Châteauneuf-les-Martigues, Saint-Victoret, Ensuès-la-Redonne et Gignac-la-Nerthe. À La Ciotat, la zone d'activités Athélia prévoit une extension de 30 ha. À Roquefort-la-Bédoule, une extension de la zone sur 3,7 ha est en cours de réalisation. Mais le projet phare demeure la ZAC des Florides et son technoparc dédié aux industries aéronautiques et à la sous-traitance d'excellence (mécanique, matériaux...) autour de l'hélicoptère du futur porté par Eurocopter.
Peut-être que dans quelques années, l'on retiendra qu'Eurocopter aura non seulement contribué à structurer un écosystème régional aéronautique mais aussi à faire bouger les lignes réglementaires et opérationnelles en faisant partager sa vision d'industriel par un ensemble de collectivités permettant une mise à niveau des moyens de transport et une mobilisation du foncier en direction des acteurs de la filière... "Toute la difficulté aujourd'hui est de créer une offre suffisamment attractive pour attirer d'autres donneurs d'ordre et drainer l'activité industrielle sur ce site", ajoute Rémi Lauze, en charge de la stratégie foncière de la filiale d'Eads. À Toulouse, Airbus France a poursuivi, année après année, une politique de constitution des réserves autour des sites où le foncier était disponible. Du foncier qu'il loue aujourd'hui à sous-traitants. Et pendant longtemps, les élus locaux ont reproché à l'industriel, avec ses salariés répartis dans 390 communes, de contribuer la périurbanisation et à l'étalement urbain de la métropole.

A.D


*et dont Méridien MAG est partenaire

Photo : ©CCIMP

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